Jurisprudence
Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 25 avril 1990, 87-18.675, Publié au bulletin
N° de pourvoi 87-18675

Président :M. Jouhaud
Rapporteur :M. Viennois
Avocat général :M. Charbonnier
Avocats :la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :


Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société civile professionnelle
Y...
et X... (la SCP), titulaire d'un office notarial à Pointe-à-Pitre, a admis, le 30 mai 1985, comme nouvel associé M. Z... ; que, le 5 décembre 1985, M. X... a fait connaître par écrit à M. Y... qu'il s'opposait au recrutement par celui-ci de sa fille, une telle décision ne pouvant être prise que par l'assemblée des associés ; que, le 1er janvier 1986, les associés ont été autorisés à transférer l'office notarial à Baie-Mahaut sur demande conjointe de MM. Y... et X... ; que, cependant, M. Y... a refusé de suivre ses deux associés et est demeuré installé à Point-à-Pitre ; que M. Y... a alors assigné MM. X... et Z... en dissolution de la SCP sur le fondement de l'article 1844-7, 5e, du Code civil, en faisant valoir la mésentente existant entre les associés ;

Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt confirmatif attaqué (Basse-Terre, 1er juillet 1987) de l'avoir débouté de sa demande, alors, selon le moyen, d'une part, que la mésentente entre les associés constitue un juste motif de dissolution indépendamment de toute appréciation du comportement des associés assignés, de sorte qu'en subordonnant la dissolution à l'existence d'une faute commise par l'un de ceux-ci, la cour d'appel a violé l'article 1844-7, 5e, du Code civil ; alors, d'autre part, que si la demande de dissolution peut être rejetée lorsque la mésentente est imputable au seul demandeur, c'est à la condition que cette circonstance soit établie par celui qui s'en prévaut à titre de moyen de défense, de sorte qu'en mettant à la charge du demandeur la preuve qu'il n'était pas seul responsable de la situation, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve ; alors, de troisième part, qu'ayant retenu que l'affectio societatis n'existait plus qu'entre deux des trois associés, la cour d'appel a constaté en réalité sa disparition et qu'en refusant de prononcer la dissolution de la SCP, elle n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ; et alors, enfin, que la cour d'appel, qui a constaté qu'en fait les associés étaient d'ores et déjà séparés, ne pouvait, pour refuser la dissolution, se borner à constater que des décisions pouvaient continuer à être prises en assemblée, sans rechercher si le fonctionnement quotidien de la société n'était pas paralysé par la mésentente ;

Mais attendu qu'après avoir estimé qu'une mésentente grave existait entre les associés en raison de l'engagement par M. Y... de sa fille, sans que l'assemblée de la SCP ait été appelée à en délibérer, et de son refus de s'établir au nouveau siège de l'office notarial, bien qu'il ait lui-même sollicité ce transfert, la cour d'appel retient à bon droit, sans inverser la charge de la preuve, que cette mésentente, dont il était seul responsable, ne pouvait constituer pour M. Y..., un juste motif l'autorisant à demander la dissolution anticipée de la SCP ; qu'elle a ainsi légalement justifié cette décision ; d'où il suit qu'en aucune de ses quatre branches le moyen n'est fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi