Jurisprudence
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 février 2015, 13-16.457, Publié au bulletin
N° de pourvoi 13-16457
ECLI:FR:CCASS:2015:SO00252

M. Frouin
Mme Mariette
M. Weissmann
Me Delamarre, SCP Gatineau et Fattaccini

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 21 février 2013), que M. X... qui exerce les fonctions d'adjoint chef de magasin avec un statut d'agent de maîtrise, au sein de la société Aldi marché (la société), spécialisée dans le commerce alimentaire, a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que le salarié est en droit de percevoir une rémunération pour ses temps d'habillage et de déshabillage et de la condamner à payer une somme à ce titre, alors, selon le moyen, que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs, et de contribuer à l'amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l'accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité ; qu'en conséquence, il n'a pas à être consulté préalablement à la modification du règlement intérieur intervenue pour préciser que les salariés peuvent revêtir les vêtements de travail fourmis par l'employeur en dehors de l'entreprise dès lors qu'il s'agit pour eux de venir travailler ou de rentrer à leur domicile après le travail ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 4612-1 et L. 1321-4 du code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail que les clauses du règlement intérieur ne peuvent être modifiées qu'après que le projet a été soumis à l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail pour les matières relevant de sa compétence ;

Et attendu qu'ayant relevé, qu'alors que l'article 16 du règlement intérieur prévoyait que les vêtements de travail ne devaient pas être portés en dehors du lieu et des heures de travail, l'employeur avait introduit, à compter du mois de mai 2009, une exception permettant au salarié de venir et de repartir de son travail en portant sa tenue de travail, sans soumettre cette modification au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la cour d'appel a décidé à bon droit que cette modification n'était pas opposable au salarié ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu que le moyen, qui n'est dirigé que contre la partie du dispositif de l'arrêt ayant ordonné une mesure d'expertise et déterminé la mission de l'expert, est irrecevable ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Aldi marché aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Aldi marché à payer à M. X..., la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille quinze.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Aldi marché

PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR annulé l'avertissement du 5 janvier 2009 et condamné la SARL ALDI MARCHE à payer à Monsieur Nazim X... la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts,

AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article L.1333-1 du Code du travail, en cas de litige portant sur une sanction disciplinaire, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.
Au vu des éléments retenus pour prendre la sanction qui sont fournis par l'employeur et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. En l'espèce, la lettre d'avertissement est ainsi motivée (...).
- s'agissant du premier manquement, la société ALDI MARCHE produit un courrier du CNIPT (centre national interprofessionnel de la pomme de terre) faisant état d'un contrôle opéré le 14 octobre 2008 ayant permis de constater que des lots de pommes de terre n'étaient pas conformes aux exigences de l'arrêté du 3 mars 1997 en ce qu'elles étaient germées en raison d'un trop long délai en magasin. En sa qualité d'adjoint de magasin, Monsieur X... assure, en l'absence du chef de magasin, la gestion du magasin en se conformant aux directives émanant de ses supérieurs hiérarchiques. Dans le cadre des directives générales en vigueur, il lui appartient d'accomplir toutes les tâches relatives à la vente, au travail en caisse ainsi qu'au réapprovisionnement du magasin. À ce titre, Monsieur X... est bénéficiaire d'une délégation écrite de pouvoir le rendant responsable, en l'absence du chef de magasin, du contrôle des produits mis en vente. Dans ce cadre, une délégation de pouvoir en faveur d'un employé commercial ne peut s'envisager qu'en cas d'absence simultanée du chef de magasin et de son adjoint. Tel n'était pas le cas en l'espèce puisque Monsieur X... travaillait dans le magasin le jour du contrôle ainsi qu'en atteste la feuille de présence. Il était donc bien responsable du contrôle des produits mis en vente. Pour autant, il ressort des explications fournies par Monsieur X..., non contestées par l'employeur, comme des photographies qu'il produit, que les pommes de terre sont livrées en magasin par box contenant 50 filets de 5 kilos et conservées à température ambiante. Il en résulte que ces conditions de stockage, outre qu'elles favorisent la germination des produits, rendent difficiles le contrôle fraîcheur des filets situés au fond du box, lesquels ne sont ni visibles ni directement accessibles. Or, ni le relevé de contrôle, ni la lettre du CNIPT ne précisent où se trouvaient les filets contenant les pommes de terre germées, étant observé que celles-ci représentaient moins de 20 % de l'échantillon contrôlé. Dans ces conditions, l'employeur ne démontre pas qu'il ait mis le salarié en mesure d'éviter ce type de situation, ni que l'image de la société ait pu en souffrir puisque l'on ignore si ces pommes de terre germées étaient visibles et accessibles par la clientèle. Ce manquement n'est pas établi.
- s'agissant du second manquement, il y a lieu de relever que les recommandations concernant les livraisons ne comportent aucune indication de temps. En revanche, l'entreprise insiste sur la nécessité d'un contrôle rigoureux, mentionnant que "pendant le contrôle, le responsable magasin doit être assidu et ne pas être interrompu". Cette rigueur est d'autant plus nécessaire que l'entreprise reconnait procéder à des tests, notamment en livrant des marchandises non commandées, ou en ne livrant que partiellement celles commandées. Or, Monsieur X... justifie de ce que le 7 novembre, en l'absence du chef de magasin, il a dû, non seulement réceptionner cette livraison, mais, dans le même temps, effectuer diverses tâches lui incombant en sa qualité de responsable hiérarchique (accès à l'armoire produits sensibles, erreurs de caisse, remboursements...) alors que le magasin connaissait une grande affluence.
Dès lors, l'employeur, qui ne justifie d'aucune durée moyenne normale de déchargement, n'établit pas le caractère anormal du temps de déchargement en cause et aucune faute ne saurait être retenue à l'encontre du salarié.
Aucun des deux griefs n'étant établi, c'est à bon droit que les premiers juges ont annulé l'avertissement délivré et ont alloué à monsieur X..., au vu du préjudice subi, une indemnisation de 2000 euros » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« En application de l'article L.1333-1 du code du travail, en cas de litige, l'employeur doit fournir les éléments qu'il a retenus pour prendre la sanction disciplinaire à la juridiction prud'homale, laquelle doit apprécier si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction au vu de ces éléments et de ceux produits par le salarié à l'appui de ses allégations. Monsieur Nazim X... exerce les fonctions d'employé commercial niveau 2. Son contrat de travail prévoit que dans le cadre des directives générales en vigueur ses tâches consistent à accomplir dans le magasin où il exerce ses fonctions, toutes tâches relatives à la vente, au travail en caisse, ainsi qu'au réapprovisionnement du magasin. Il bénéficie du statut d'agent de maîtrise et exerce les fonctions d'adjoint au chef de magasin. En l'espèce, il lui est reproché deux manquements : - le caractère non satisfaisant du contrôle fraîcheur réalisé par le CNIPT le 14 août 2008 puisque que les pommes de terre mises en vente présentaient des germes importants alors que Monsieur Nazim X... avait en l'absence de son supérieur hiérarchique la responsabilité du magasin. - la durée anormalement élevée du temps de déchargement d'un camion de livraison le 7 novembre 2008.
* Sur le premier manquement : La société ALDI MARCHE verse au débat un courrier du CNIPT dont il résulte suite au contrôle effectué en magasin le 14 octobre 2008 que des lots de pommes de terre vérifiés n'étaient pas conformes aux exigences de l'arrêté du 3 mars 1997 car certaines pommes de terre étaient germées en raison d'un trop long délai en magasin. Ce sont les conditions de stockage qui semblent donc être à l'origine des anomalies présentées. Il s'avère en outre, que le 14 octobre 2008, ce n'est pas Monsieur Nazim X... qui a effectué le contrôle fraîcheur du matin, mais l'employé principal Monsieur Y... qui supporte la responsabilité du contrôle qu'il a effectué et ce dans la mesure où l'employeur ne rapporte pas la preuve que ledit contrôle ne pouvait être exclusivement effectué que par Monsieur X.... Dès lors Monsieur Nazim X... ne pouvait être sanctionné de ce chef.
* sur le second manquement : Il est reproché à Monsieur Nazim X... un temps de déchargement particulièrement élevé d'un camion lors de sa réception du 7 novembre 2008 soit une heure 55 au lieu des 1 heure à 1 heure 15 admissible selon l'employeur. Monsieur Nazim X... justifie de la durée de cette livraison par les tâches annexes qu'il devait assurer en même temps tout en contrôlant la marchandise livrée. L'employeur ne justifie pas du caractère d'anormalité du temps de déchargement, la faute du salarié n'est en l'espèce nullement établie. Il apparaît dès lors que le second grief ne justifie pas davantage une sanction disciplinaire.
Il convient en conséquence en application de l'article L. 1333-2 du Code du Travail d'annuler l'avertissement prononcé. Monsieur Nazim X... a subi un préjudice certain du fait de cette sanction disciplinaire injustifiée. Il lui sera alloué une somme de 2000 ¿ en réparation de son préjudice » ;

1) ALORS QUE le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas reconnaissance de ce fait ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a retenu qu'était établie la présence dans les rayons du magasin de pommes de terre germées, tout comme le fait que le salarié, bénéficiaire d'une délégation de pouvoirs, était responsable du contrôle des produits mis en vente ; qu'il appartenait dès lors au salarié de rapporter la preuve de circonstances de nature à établir que la situation ne lui était pas imputable ; qu'en se fondant cependant sur la circonstance que les explications données par monsieur X... quant aux conditions de stockage des pommes de terre n'étaient pas contestées par l'employeur pour en déduire que le salarié n'était pas fautif, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;

2) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de préciser l'origine de leurs renseignements ; qu'en affirmant péremptoirement que les conditions de stockage des pommes de terre, à température ambiante en box contenant 50 filets de 5 kilos, favorisent la germination des produits et rendent difficiles le contrôle fraîcheur des filets situés au fond du box lesquels ne sont ni visibles ni directement accessibles, sans dire d'où elle tirait ces renseignements, quand seule était en cause la germination qui selon toute vraisemblance ne peut se faire qu'à la lumière, c'est-à-dire sur le dessus des stocks si bien que la suppression des produits germés ne nécessitait pas l'accès au fond des box, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

3) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de motiver leur décision et à ce titre de viser et d'analyser les éléments de preuve versés aux débats ; qu'en affirmant péremptoirement que l'employeur n'établit pas le caractère anormal du temps de déchargement en cause sans viser ni analyser la pièce n° 11 versée aux débats, montrant qu'il suffisait de 1 h 05 pour réceptionner une livraison similaire à celle que monsieur X... à mis 1 h 55 à finaliser, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Monsieur Nazim X... est en droit de percevoir une rémunération pour ses temps d'habillage et de déshabillage et condamné l'employeur à payer 526,87 euros à ce titre ;

AUX MOTIFS QUE « Selon l'article L.3121-3 du code du travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties. Ces contreparties sont accordées soit sous forme de repos, soit sous forme financière, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, par des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail. Jusqu'au mois de mai 2009, l'article 16 du règlement intérieur de la société ALDI MARCHE précisait que le personnel était tenu de porter les blouses, badges ou vêtements dont le port était imposé pour le poste occupé et que les vêtements de travail ne devaient pas être portés en dehors du lieu et des heures de travail. Cette disposition obligeait nécessairement les salariés à revêtir la tenue de travail et à l'enlever sur le lieu du travail. Au demeurant, et compte tenu des réclamations formulées par certains salariés, l'employeur a, à compter du mois de mai 2009 et après avis favorable émis par le comité d'entreprise, modifié le règlement intérieur en maintenant l'interdiction précitée, mais en introduisant une exception : "sauf lorsqu'ils sont portés pour la prise de poste", permettant ainsi au salarié de venir et repartir de son travail en portant sa tenue de travail. Cette modification étant cependant intervenue sans consultation du comité d'hygiène et de sécurité, en méconnaissance des dispositions de l'article L.1321-4, Monsieur X... est bien fondé à solliciter le paiement de ses temps d'habillage et de déshabillage dans la limite de la prescription quinquennale. Si la tenue de travail de ce dernier consiste dans le port d'une simple blouse, il convient de tenir compte du fait qu'il pouvait, en fonction de ses horaires, être amené à ôter et remettre ce vêtement plusieurs fois par jour. En conséquence, il y a lieu d'admettre une durée de 2,5 min par jour, telle qu'il la vise lui-même et de lui allouer à titre de contrepartie la somme de 526,87 euros selon le décompte produit et non contesté » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« Au terme de l'article L. 3121-3 du code du travail " le temps nécessaire aux opérations d'habillage de déshabillage fait l'objet de contreparties. Ces contreparties sont accordées soit sous la forme de repos, soit sous forme financière, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, par des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le travail. Ces contreparties sont déterminées par conventions ou accords collectifs de travail ou, à défaut, par le contrat de travail, sans préjudice des clauses des conventions collectives, de branche, d'entreprise ou d'établissement, des usages ou des stipulations du contrat de travail assimilant ces temps d'habillage et de déshabillage à des temps de travail effectif. Il résulte de ces dispositions que le bénéfice des contreparties pécuniaires autant d'habillage que de déshabillage est subordonné à la réalisation cumulative de deux conditions : le caractère obligatoire du port d'une tenue de travail, d'une part, et le fait que l'habillage et le déshabillage soient réalisés sur le lieu de travail d'autre part. En l'espèce, l'article 16 du règlement intérieur de la SARL ADLI MARCHE précise : « le personnel doit être correctement vêtu. Il est tenu de porter les blouses, badges ou vêtements dont le port est imposé pour le poste occupé... Les vêtements de travail fournis par la société ne doivent pas être portés en dehors du lieu et des heures de travail. » Il en découle que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés sur le lieu de travail et doivent faire l'objet d'une contrepartie. En l'espèce, il est établi et non contesté que la tenue de travail de Monsieur Nazim X... consiste dans le port d'une simple blouse. Le 7 mai 2009, après consultation du comité d'entreprise, le règlement intérieur a été modifié et il est désormais stipulé que les vêtements de travail fournis par la société ne doivent pas être portés en dehors du lieu et des heures de travail, sauf lorsqu'ils sont portés pour la prise de poste. Il s'en déduit que le salarié a la faculté de venir et de repartir de son travail en blouse. Toutefois, la modification du règlement intérieur est intervenue sans la consultation préalable du comité d'hygiène et de sécurité en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail. Dès lors, la modification du règlement intérieur n'est pas opposable aux salariés et Monsieur Nazim X... est donc en droit de solliciter une contrepartie financière pour les temps d'habillage et de déshabillage effectués sur son lieu de travail » ;

ALORS QUE le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs, et de contribuer à l'amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l'accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité ; qu'en conséquence, il n'a pas à être consulté préalablement à la modification du règlement intérieur intervenue pour préciser que les salariés peuvent revêtir les vêtements de travail fourmis par l'employeur en dehors de l'entreprise dès lors qu'il s'agit pour eux de venir travailler ou de rentrer à leur domicile après le travail ; qu'en affirmant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L.4612-1 et L.1321-4 du Code du travail.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné une expertise, l'expert ayant pour mission de fournir à la cour tous éléments comptables et de fait de nature à permettre - de déterminer le nombre d'heures supplémentaires effectuées par le salarié entre la 35eme heure et la 42ème heure sur la période du 16 février 2004 au 31 août 2012, et le quantum des sommes dues à ce titre par l'employeur, - de fournir à la cour tous éléments comptables et de fait de nature à permettre de déterminer le nombre d'heures supplémentaires effectuées par le salarié au-delà de la 42ème heure sur la même période, et le quantum des sommes restant dues à ce titre par l'employeur en tenant compte de la majoration de 25 % déjà appliquée, - de fournir à la cour tous éléments comptables et de fait de nature à permettre de déterminer l'indemnisation des repos compensateurs générés par les heures supplémentaires sur le fondement des textes applicables selon les périodes ;

AUX MOTIFS QU'« Il convient en premier lieu de constater que si Monsieur X... a modifié le fondement juridique de sa demande en paiement au titre d'heures supplémentaires ainsi que le quantum de cette demande, cette prétention relative à un rappel de salaire pour des heures supplémentaires a bien été introduite en première instance, en sorte que la prescription quinquennale a été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes de CASTRES le 16 février 2009. En second lieu, les anciens articles L.3122-8 et suivants du code du travail, abrogés par la loi du 20 aout 2008, prévoyaient la possibilité, par convention ou accord collectif, de faire varier la durée du travail sur tout ou partie de l'année à condition que sur un an cette durée n'excède pas 1607 heures, et sous réserve du respect d'un certain nombre de prescriptions. En particulier, l'ancien article L.3122-13 prévoyait que le programme de la modulation était soumis pour avis avant sa mise en oeuvre au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel. Si la loi du 20 août 2008 a assoupli les conditions de recours à la modulation du temps de travail, elle n'a cependant pas remis en cause les accords antérieurement conclus, lesquels sont restés en vigueur (article 20 de ladite loi) et doivent continuer à s'appliquer dans les conditions fixées par la législation antérieure. En l'occurrence, et en application des dispositions de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, la société ALDI MARCHE a mis en place en 2002 par une note de service un système de modulation du temps de travail, aux termes duquel les heures effectuées entre la 35ème heure et la 42ème heure ne sont pas des heures supplémentaires, mais alimentent un compteur de modulation qui ouvre droit à des jours de récupération. Reprenant les dispositions légales, l'article 5.2 de cette convention prévoit que la programmation "sera établie suivant les procédures de discussion propres à chaque entreprise ou établissement dans le respect des attributions des institutions représentatives du personnel ; elle fera l'objet d'une consultation du comité d'entreprise ou d'établissement, à défaut des délégués du personnel, et sera portée à la connaissance du personnel, au moins 15 jours avant la date prévue pour sa mise en application". Or, la société ALDI MARCHE ne justifie pas avoir soumis pour avis avant sa mise en oeuvre le programme de modulation au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, la seule consultation du comité d'entreprise produite datant de 2010. Il en résulte que les modalités de mise en place de la modulation n'étant conformes ni aux dispositions légales, ni à l'article 5.2 de la convention collective qui reprend cette exigence de consultation préalable, la modulation n'est pas opposable à Monsieur X... et le régime de droit commun des heures supplémentaires est applicable » ;

1. ALORS QUE le défaut de consultation du comité d'entreprise sur la modulation du temps de travail ne rend pas inopposable au salarié le système mis en place sauf si le salarié peut se prévaloir du grief qui lui aurait causé ce défaut de consultation ; qu'en déclarant inopposable au salarié le système de modulation du temps de travail mis en place sans constater que le salarié invoquait un grief tiré du défaut de consultation du comité d'entreprise, la Cour a violé l'article 5.2 de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et les anciens articles L. 3122-8 et suivants du Code du travail, abrogés par la loi du 20 août 2008.

2. ALORS QU'après avoir affirmé que la modulation du temps de travail devait faire l'objet d'une consultation du comité d'entreprise ou d'établissement, ou à défaut des délégués du personnel, la Cour d'appel a constaté que l'employeur justifiait d'une consultation du comité d'entreprise datant de 2010 (pièce n° 17, procès-verbal de la réunion du CE du 30 aout 2010) ; qu'en omettant cependant d'en déduire que la modulation du temps de travail était opposable au salarié à compter de cette date, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 5.2 de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire et les anciens articles L.3122-8 et suivants du Code du travail, abrogés par la loi du 20 aout 2008.