Aggrandir la taille du texteRéduire la taille du texte
Parution: mars 2021

6 - Télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure

Circonstances exceptionnelles ou force majeure

Recourir au télétravail

Cas de recours au télétravail

6-1

En cas de circonstances exceptionnelles ou en cas de force majeure, le recours au télétravail peut être nécessaire pour permettre la continuité de l'activité de l'entreprise et garantir la protection des salariés (c. trav. art. L. 1222-11).

Une circonstance exceptionnelle peut être par exemple une épidémie (ex. : la Covid-19), une catastrophe naturelle, une destruction accidentelle des locaux de travail, etc.

Objectif visé : assurer la continuité de l'entreprise et la protection des salariés

6-2

En cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure, le télétravail est considéré comme un aménagement du poste du travail pouvant être imposé unilatéralement par l’employeur au(x) salarié(s) en vue d'assurer la continuité de l’activité de l'entreprise et de protéger les salariés (c. civ. art. 1218 ; avis n° 214 (2011-2012) de Mme Catherine Procaccia, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 20 décembre 2011 ; www.senat.fr).

Dans ce cas, il y a une dérogation au principe du volontariat (voir §§ 5-1 et s.). L’employeur peut imposer aux salariés le télétravail, dans le cadre de son pouvoir de direction.

Mise en place du télétravail

En présence d'un accord collectif ou d'une charte

6-3

L'employeur qui envisage de recourir au télétravail pour circonstances exceptionnelles peut être déjà pourvu d'un cadre de télétravail, institué par un accord collectif ou par une charte « télétravail » (c. trav. art. L. 1222-9). Face à la circonstance exceptionnelle, l'employeur et ses partenaires de négociation peuvent décider d'adapter l'accord ou la charte pour mettre en place un télétravail à 100 % (nécessairement au domicile) ou l'améliorer sur des points qui pourraient se révéler insuffisants pendant la période de circonstance exceptionnelle. Par exemple, il pourrait s'agir d'adapter le suivi du temps de travail, de renforcer le droit à la déconnexion.

La révision de l'accord se déroulera suivant les modalités habituelles de la négociation collective, selon que l'entreprise compte ou non un délégué syndical à son effectif [voir Dictionnaire Social, « Accord collectif d’entreprise (conclusion sans délégué syndical) » et « Accord collectif d’entreprise (conclusion sans délégué syndical) »].

Si l'employeur souhaite modifier la charte, il doit procéder comme pour son adoption, en soumettant les modifications à l'avis du comité social et économique (CSE) (c. trav. art. L. 1222-9). De ce point de vue, il sera préférable de rajouter à la charte existante un complément dédié à cette situation particulière.

Lorsque l’urgence le commande, il paraît logique que l’employeur applique les nouvelles mesures sanitaires préconisées par le Gouvernement dès que possible, en consultant le cas échéant les représentants du personnel, quitte à réviser par la suite son accord ou la charte.

En l'absence d'accord collectif ou de charte

6-4

Dans le cadre de circonstances exceptionnelles, le télétravail peut être organisé entre l'employeur et le salarié sans délai et sans formalisme particulier, c'est-à-dire sans qu'il soit besoin d'une clause ou d'un avenant au contrat de travail. Leur commun accord peut, dans ce cas, être formalisé par tout moyen (ex. : par mail).

Apport de l'ANI 2020 sur le télétravail d'urgence

6-5

Les signataires de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 26 novembre 2020 pour une mise en œuvre réussie du télétravail considèrent qu’il est utile, afin de garantir la continuité de l’activité de l’entreprise, d’anticiper l’organisation du recours au télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou en cas de force majeure.

L'ANI énonce l’importance de prévoir dans l’accord ou, à défaut, la charte relatifs au télétravail, lorsqu’ils existent, les conditions et modalités de mobilisation du télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure (ANI du 26 novembre 2020, art. 7-1).

En l’absence d’accord, le CSE doit être consulté sur les mesures d’organisation relatives à la continuité de l’activité et, à tout le moins, consulté dans les plus brefs délais sur les décisions prises (ANI du 26 novembre 2020, art. 7-1 et 7-3-1).

Dans les entreprises sans délégué syndical (DS) ou sans CSE, une concertation avec les salariés est alors conseillée avant de mettre en place un plan de continuité de l‘activité par décision unilatérale (ANI du 26 novembre 2020, art. 7-1).

Énumération des suggestions de l'ANI du 26 novembre 2020

Dans sa partie sur la mise en œuvre du télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure, l'ANI préconise :

-d’anticiper et d’organiser cette modalité de recours au télétravail dans l’accord ou la charte, ou dans un plan de continuité ;

-de prévoir un processus adapté à l'entreprise avec, en fonction de la taille de celle-ci, des personnes référentes pour permettre le partage d’informations, l'identification et le suivi des situations individuelles et collectives susceptibles d'entraîner des difficultés ;

-de consulter le CSE dans les plus brefs délais sur la décision prise de recourir immédiatement au télétravail pour répondre à une situation exceptionnelle ou un cas de force majeure ;

-d’informer rapidement les salariés par tout moyen sur l’organisation du télétravail, de préférence par écrit (ex. : période prévue ou prévisible de télétravail, organisation des conditions de travail individuelles, organisation des relations collectives de travail, organisation du temps de travail, modalités de prise en charge des frais professionnels, règles d'utilisation des outils numériques, etc.) ;

-d’apporter une vigilance particulière à la santé et la sécurité des salariés compte tenu des éventuelles difficultés que le télétravail en cas de circonstances exceptionnelles peut occasionner ;

-de prévoir les modalités d’organisation du dialogue social et de l'exercice du droit syndical en cours de télétravail. À cet effet, l'ANI suggère de prévoir un protocole de fonctionnement des IRP en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure ayant notamment pour objet de prévoir des assouplissements aux règles habituelles (ex. : aménagement des délais de consultation, recours à la visioconférence pour les réunions, adaptation des règles de communication entre les salariés et leurs représentants).

Télétravail au temps de la crise sanitaire liée au covid-19

Recommandations par le protocole sanitaire et les Q/R du ministère du Travail

Protocole sanitaire

6-6

L’employeur a une obligation de sécurité à l’égard des salariés qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour protéger leur santé physique. Il doit notamment les informer lorsque des risques se présentent et mettre en place les moyens adaptés pour protéger au mieux les salariés (c. trav. art. L. 4121-1 et L. 4121-2).

Dans le cadre de l'épidémie liée au covid-19, les pouvoirs publics n'ont inscrit l'« obligation » de télétravail ni dans une loi, ni dans un décret, ni même dans une circulaire opposable. Le télétravail est simplement prévu dans le protocole sanitaire selon lequel ce dispositif participe à la démarche du risque covid-19 (Protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l'épidémie de covid-19, I, du 31 août 2020, entrée en vigueur le 1er septembre 2020 ).

Concrètement, ce protocole édicte un ensemble de « recommandations » à l'égard des employeurs. Il n'a donc pas en lui-même de portée obligatoire. Sa méconnaissance ne peut donc pas, en tant que telle, être directement sanctionnée par l'inspecteur du travail. L'administration rappelle toutefois que le respect par l'employeur de ces recommandations aura une incidence sur l'appréciation du manquement ou non à son obligation légale de sécurité (note DGT du 14 septembre 2020).

Côté jurisprudence, le Conseil d'État considère que le protocole contient des mesures concrètes qui permettent à l’employeur de mettre en œuvre son obligation légale de sécurité (CE 19 octobre 2020, n° 444809). Dans cette affaire, il a ainsi précisé que l’obligation de sécurité implique que « l’employeur est tenu de prendre et doit pouvoir justifier avoir pris toutes les mesures de prévention nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés ».

Dans une autre affaire, il rappelle que « si certains termes du protocole sont formulés en termes impératifs », le protocole a « pour seul objet d'accompagner les employeurs dans leurs obligations d'assurer la sécurité et la santé de leurs salariés au vu des connaissances scientifiques sur les modes de transmission du SARS-CoV-2 » (CE 17 décembre 2020, n° 446797).

Rappelons, à ce titre, que le télétravail est une mesure de prévention collective des risques « covid-19 » qui permet d'éviter ou de limiter ces risques, et en premier lieu celui de la contamination sur le lieu de travail. Le télétravail a également pour objectif de réduire les interactions sociales aux abords des lieux de travail et sur les trajets domicile-travail (Protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l'épidémie de covid-19, II).

Document questions/réponses du ministère du Travail sur le télétravail

6-7

Le ministère du travail a diffusé les mesures à prendre dans les entreprises, sous forme d’un document de questions/réponses sur le télétravail en période de Covid-19, publié sur son site internet (Q/R « Télétravail en période de covid-19 », dans sa version mise à jour le 25 mars 2021). Dès la première diffusion de ce document, le ministère a indiqué que le télétravail était la solution à privilégier lorsque cela était possible.

Ce document questions/réponses de l’administration n’a pas en lui-même de valeur juridique opposable. S’il donne le « La » de la doctrine de l’administration, ces positions s’entendent sous réserve de l’appréciation des tribunaux en cas de litige.

Télétravail en période de crise sanitaire liée au covid-19 : synthèse des questions/réponses du ministère du Travail (1)

Q/R du ministère du Travail

Commentaires

Télétravail imposé

• La menace d’épidémie fait partie des situations permettant d’imposer le télétravail

• La mise en œuvre du télétravail dans ce cadre ne nécessite aucun formalisme particulier

Rappel du code du travail (c. trav. art. L. 1222-11)

Mieux vaut à notre sens se ménager une preuve de l’organisation retenue

Refus du télétravail

• L'employeur peut refuser le télétravail pour les activités qui ne peuvent pas être exercées à distance, celles-ci étant le cas échéant identifiées dans l'accord collectif ou la charte télétravail. Dans ce cas, l’activité peut se poursuivre sur le lieu de travail, conformément aux recommandations figurant dans le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés

Conséquence du principe selon lequel le télétravail suppose l’accord des parties, sous réserve des dispositions d’un éventuel accord collectif ou d’une éventuelle charte (c. trav. art. L. 1222-9)

Contractualisation

Le recours au télétravail ne requiert pas d’avenant au contrat de travail, qu’il soit exercé dans des circonstances normales ou dans des circonstances exceptionnelles

Rappel du code du travail (c. trav. art. L. 1222-9, I)

Jours de télétravail

L’employeur est décisionnaire pour déterminer le nombre de jours de télétravail et leur répartition en cas d’alternance télétravail/présence sur le lieu de travail. Cette décision est prise « à la suite d’un dialogue entre le salarié et l’employeur »

• Précision (2) (c. trav. art. L. 1222-9)

Attention : le cas échéant, l’employeur doit respecter les modalités autres qui peuvent être prévues en la matière par l’accord collectif, la charte ou, en leur absence, l’accord formalisé entre l’employeur et le salarié par tout moyen (c. trav. art. L. 1222-9, I)

Congés payés

L’employeur a le droit d’imposer les congés payés, dans le respect des dispositions du code du travail et de la convention collective applicable à l’entreprise, mais il n’a pas le droit de faire travailler les salariés pendant les congés payés

Rappel du code du travail (c. trav. art. L. 1222-9, L. 3141-15 et L. 3141-16)

Activité partielle (dit aussi « chômage partiel »)

• Télétravail et activité partielle peuvent alterner, l’employeur étant décisionnaire de la quotité de travail pouvant être exercée en télétravail et de sa répartition par rapport à l'activité partielle

• En revanche, un salarié ne peut pas travailler et être en activité partielle au même moment, sous peine de sanctions, y compris pénales

Simples conséquences des règles générales voulant qu’un salarié ne peut pas être en activité partielle et travailler (que ce soit en télétravail ou sur site) au même moment. Si un salarié en télétravail est aussi en chômage partiel sous forme de réduction d’horaire, il est important de bien séparer les deux temps pour éviter tout risque (3)

Contrôle du travail à distance

• Les droits de l’employeur en matière de surveillance des salariés ne diffèrent pas selon que ceux-ci travaillent sur site ou à distance

• Aucun dispositif ne doit conduire à une surveillance constante et permanente de l’activité du salarié (ex. : les « keyloggers » sont illicites sauf circonstance exceptionnelle liée à un fort impératif de sécurité). De même le recours à la webcam ou à des appels téléphoniques ne doit pas conduire à une surveillance excessive

Application des principes généraux en matière de surveillance des salariés

Horaires, temps de repos et droit à la déconnexion

Le salarié respecte les horaires de travail. L’employeur respecte les temps de repos et le droit à la déconnexion

Rappels du code du travail (c. trav. art. L. 1222-9 et L. 2242-17)

Ordinateur personnel, accès VPN

• Le salarié peut utiliser son ordinateur personnel mais ce n’est pas une obligation. Si l’employeur impose le télétravail, il doit fournir un ordinateur si le salarié n’en a pas ou ne veut pas utiliser son ordinateur personnel

• L’évaluation de la compatibilité du poste avec le télétravail appartient à l’employeur. Si aucune solution technique ne permet au salarié d’accéder à ses mails et ses données professionnelles (accès VPN), celui-ci travaille en présentiel, l'employeur respectant le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés

Précisions du ministère. De son côté, l’ANI du 19 juillet 2005 (4), applicable en cas de télétravail régulier, prévoit que l’employeur fournit et entretient les équipements nécessaires au télétravail et que si, exceptionnellement, le télétravailleur utilise son propre équipement, l’employeur en assure l’adaptation et l’entretien (art. 7)

Espace dédié au télétravail

Le salarié n’a pas à garantir à son employeur un espace de travail dédié au télétravail, sauf si l’accord collectif ou la charte le précise

Précisions du ministère

Titres-restaurant

Si les salariés exerçant leur activité dans les locaux de l’entreprise bénéficient de titres-restaurant, les télétravailleurs doivent aussi en recevoir si leurs conditions de travail sont équivalentes

Application notamment du code du travail (c. trav. art. L. 1222-9, III et R. 3262-7) et de la jurisprudence (cass. soc. 22 janvier 1992, n° 88-40938, BC V n° 26)

Titres de transport

• Lorsque le télétravail s’effectue par alternance (ex. : 1 ou 2 jours par semaine ou une semaine sur deux), l’employeur doit prendre en charge dans les conditions habituelles les titres d’abonnement qui ont été utilisés au moins une fois pour le trajet entre la résidence habituelle et le lieu de travail du salarié, sans abattement des jours en télétravail

• Lorsque le salarié est placé en situation de télétravail à domicile « en continu » sur le mois ou la semaine, l’employeur n’est pas tenu par cette obligation de prise en charge, dès lors que le salarié n’a eu à effectuer aucun trajet entre son domicile et son lieu de travail au moyen de son abonnement de transports durant la période considérée. Toutefois, les employeurs sont invités à maintenir la prise en charge partielle des abonnements de transport des salariés titulaires d’un abonnement annuel, qui n’ont pu procéder à la suspension de leur contrat d’abonnement pour le mois non utilisé et ont donc supporté son coût

• Application du code du travail (c. trav. art. L. 3261-2 et R. 3261-2)

• Précisions du ministère

Accident du travail

Le télétravailleur est couvert pour le risque accident du travail

Rappel (c. trav. art. L. 1222-9, III ; c. séc. soc. art. L. 411-1)

(1) Version en ligne sur www.travail.gouv.fr au 25.03.2021.

(2) Il s’agit non d’une précision par rapport aux dispositions spécifiques du code du travail sur le télétravail mais d’un rappel à notre sens du principe jurisprudentiel selon lequel la définition des horaires de travail relève du pouvoir de direction de l’employeur, à moins que ceux-ci ne soient contractualisés.

(3) Si l'activité partielle se traduit par une fermeture de l’entreprise (suspension d’activité), les choses sont plus simples puisque le salarié ne doit pas du tout travailler.

(4) Accord national interprofessionnel obligatoire pour les employeurs relevant d’un secteur professionnel représenté par les organisations patronales signataires (Medef, CPME, UPA) (étendu par arrêté du 30 mai 2006, JO du 9 juin), sous réserve toutefois d’un accord collectif d’entreprise qui en écarterait l’application. Voir aussi l'ANI du 26.11.2020.

Télétravail recommandé ou imposé en fonction du contexte sanitaire

6-8

Les pouvoirs publics ont ajusté leur position au fil de l’évolution de la situation sanitaire. Pendant la première phase de la crise sanitaire, le télétravail fut impératif durant le premier confinement, puis à son issue et après plusieurs étapes, il est devenu simplement recommandé à partir du 1er septembre 2020. Fin septembre, dans les zones d’alerte renforcée et maximale, les recommandations de télétravail sont redevenues plus fortes. À partir du 17 octobre, un nombre minimal de jours de télétravail a été exigé dans les zones de couvre-feu.

Avec le deuxième confinement (du 30 octobre au 14 décembre 2020), le télétravail n'était plus une option mais une obligation pour toutes les activités télétravaillables, selon le protocole sanitaire. Le déconfinement en plusieurs étapes fin novembre et mi-décembre 2020 n’a rien changé en la matière. La donne a changé au 9 juin 2021. Les employeurs sont invités à fixer, dans le cadre du dialogue social, un nombre minimal de jours de télétravail par semaine, pour les activités qui le permettent (Protocole sanitaire, dans sa version du 9 juin 2021).

En vue de se repérer dans l'historique Télétravail pendant le covid-19, le tableau ci-après mentionne les principales périodes de télétravail « imposé » ou recommandé liées à la crise sanitaire du covid-19.

Récapitulatif des périodes de télétravail durant le covid-19 (en date du 9 juin 2021)

Recommandations

Références

Confinement du 17 mars 2020 au 10 mai 2020 (décret 2020-260 du 16 mars 2020, JO du 17)

• Recours au télétravail pour tous les postes qui le permettent

Communiqué du ministère du Travail du 16 mars 2020

Déconfinement à partir du 11 mai 2020

• Le télétravail doit « absolument être privilégié » dans les circonstances actuelles lorsque le poste est compatible, quelle que soit la couleur du département

• Il n’y a pas de priorité pour accéder au télétravail pour les salariés domiciliés dans un département « rouge ou orange »

• Si l’employeur met en place un roulement, il peut prendre en compte les situations propres à chaque salarié pour organiser l’activité en tout ou partie en télétravail

Q/R du ministère du Travail (version du 9 mai 2020)

Depuis le 1er septembre 2020

• Le temps de travail effectué en télétravail est porté à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance

Protocole sanitaire (version du 31 août 2020)

Confinement du 30 octobre 2020 au 14 décembre 2020 (décret 2020-1310 du 29 octobre 2020, JO du 30)

• Le télétravail doit être porté à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l'ensemble de leurs tâches à distance

• Pour les tâches qui ne peuvent pas être réalisées en télétravail, l'employeur doit réduire les déplacements domicile-travail et aménager le temps de présence en entreprise.

Protocole sanitaire (version du 29 octobre 2020) ; instr. DGT relative aux orientations et aux modalités d'intervention du système d'inspection du travail dans le cadre du confinement du 3 novembre 2020, § 1.1

Depuis le 7 janvier 2021

• Recours au télétravail pour toutes les activités qui le permettent, sous réserve de la possibilité dérogatoire de revenir sur le lieu de travail 1 jour par semaine (sur la base du volontariat et de l'accord de l'employeur)

Protocole sanitaire (version du 6 janvier 2021)

Depuis le 20 janvier 2021

• Le télétravail reste la règle de principe pour l’ensemble des activités qui le permettent. Dans ce cadre, le temps de travail effectué en télétravail doit être à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance

• Reste également maintenue la possibilité pour les salariés en télétravail à 100 % d’un retour en présentiel un jour par semaine au maximum lorsqu’ils en expriment le besoin avec l’accord de leur employeur

Protocole sanitaire (version du 29 janvier 2021)

Confinement du 19 mars au 3 mai 2021 (décret 2021-296 du 19 mars 2021, JO du 20)

• Le télétravail est une des mesures les plus efficaces pour prévenir le risque d’infection au virus dans un objectif de protection de la santé des travailleurs, conformément au principe de prévention énoncé par le code du travail qui consiste à éviter les risques pour la santé et la sécurité au travail (c. trav. art. L. 4121-2)

• Plan d’action pour les prochaines semaines, pour réduire au maximum le temps de présence sur site des salariés, en tenant compte des activités télétravaillables au sein de l’entreprise

Protocole sanitaire (version du 23 mars 2021)

Depuis le 3 mai 2021

• Maintien du télétravail à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance

Protocole sanitaire (version du 23 mars et du 19 mai 2021)

À partir du 9 juin 2021

• Les employeurs sont invités à fixer, dans le cadre du dialogue social, un nombre minimal de jours de télétravail par semaine, pour les activités qui le permettent

Protocole sanitaire (version du 9 juin 2021)

Dialogue social et covid-19

Consultation a posteriori du CSE sur la mise en place du télétravail

6-9

Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, l'employeur doit, en principe, lorsqu'il décide de mettre en place le télétravail, informer et consulter le CSE au titre de ses attributions liées notamment à la marche générale de l'entreprise (c. trav. art. L. 2312-8). Face à l’urgence de la crise sanitaire et pour répondre rapidement à la mesure de confinement, le ministère du Travail a admis que le CSE puisse être consulté a posteriori, c'est-à-dire après la mise en œuvre de la décision de l’employeur de recourir au télétravail. Le ministère a indiqué que l’employeur pouvait se fonder sur le texte du code du travail qui prévoit qu'en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d'épidémie, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés (c. trav. art. L. 1222-11). Dans ce cas, le CSE est consulté a posteriori « dès que possible » et l’employeur doit « sans délai » informer le CSE de sa décision (Q/R « Télétravail » du ministère du Travail ; instr. DGT du 3 novembre 2020, §§ 1.1 et 1.2).

En présence d'une commission, santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT), celle-ci doit être consultée et associée au dialogue social afin de renforcer l'efficacité des mesures de prévention mises en place dans l'entreprise (instr. DGT du 3 novembre 2020).

Pour consulter le CSE, l'employeur peut recourir à la visioconférence, conférence téléphonique ou messagerie instantanée en cas notamment de déclaration de l'état d'urgence (ex. : ord. 2020-389 du 1er avril 2020, art. 6, II, JO du 2 ; ord. 2020-1441 du 25 novembre 2020, JO du 26).

Pas de possibilité pour le salarié d’imposer à l’employeur le télétravail

6-10

Sauf circonstances exceptionnelles ou cas de force majeure, le salarié doit être d'accord pour être en télétravail (voir §§ 5-1 et s.).

Dans le contexte d'une épidémie, l'employeur peut, en revanche, imposer au salarié de passer en télétravail, puisqu'il s'agit alors d'un simple aménagement du poste de travail (c. trav. art. L. 1222-11). Toutefois, un accord paraît nécessaire s’il s’agit d’un salarié protégé. À l'inverse, le salarié ne peut pas imposer à l'employeur de télétravailler. Le document questions/réponses indique que c’est à l’employeur qu’il revient de mettre en place le télétravail dans l’entreprise, le cas échéant dans le cadre de l’accord collectif ou de la charte existant à ce sujet (Q/R « Télétravail » du ministère du Travail) (voir § 6-3).

L’employeur, qui a le pouvoir de direction dans l’entreprise, peut refuser le télétravail pour les tâches qui ne le permettent pas ou lorsqu'aucune solution technique ne le permet (Q/R « Télétravail » du ministère du Travail). Il doit motiver sa décision en cas de refus fait à un salarié qui occupe un poste éligible au télétravail dans les conditions prévues par l'accord collectif ou la charte « télétravail » (c. trav. art. L. 1222-9). Par précaution, l'employeur prudent motivera son refus y compris en l'absence d'accord ou de charte, dans le souci de préserver le dialogue social prôné par l’administration du Travail, mais aussi de se préconstituer des preuves pour faire face à d’éventuelles contestations.

À notre sens, le salarié auquel l'employeur a refusé le télétravail pourrait saisir les représentants du personnel d'une réclamation ou se rapprocher du médecin du travail qui peut proposer des aménagements du poste de travail (c. trav. art. L. 2312-5, L. 2312-8, L. 4624-3 et L. 4624-9). Il pourrait également saisir l'inspection du travail.

Activités télétravaillables

Identifier les activités télétravaillables

6-11

Crise sanitaire ou non, le télétravail suppose que les missions des salariés soient réalisables à distance. Il faut donc déterminer les postes « télétravaillables », en tout ou partie (voir §§ 10-1 et s.).

Si l'entreprise est déjà dotée d'un accord collectif ou d'une charte « télétravail », les postes éligibles au télétravail étaient déjà définis et il suffit en conséquence de s'y reporter.

À défaut d'accord ou de charte, l'employeur a dû définir ces postes (instr. DGT du 3 novembre 2020, § 1.1) ou reprendre la liste qu'il avait établie lors du premier confinement pendant lequel le télétravail était aussi la règle. Mais l'employeur peut aller plus loin et identifier dans des postes qui ne sont pas 100 % télétravaillables les tâches qui le sont, afin d’accroître le recours au télétravail.

Le ministère du Travail propose une méthode pour repérer les tâches télétravaillables, en tout ou partie, en recommandant de procéder activité par activité et non à partir des « métiers », ce en associant les salariés (Q/R « Télétravail » du ministère du Travail).

Certaines activités d'un technicien de service maintenance sont télétravaillables : back-office, suivi des réclamations, etc. En tout état de cause, c’est à l’employeur de fixer la quotité et les jours de télétravail, après un dialogue avec les salariés concernés (Q/R « Télétravail » du ministère du Travail).

Documenter l'identification des activités télétravaillables

6-12

En l'absence d'accord ou de charte, il est à notre sens recommandé de formaliser l'identification des activités télétravaillables. Ainsi, l'employeur pourra apporter la preuve de ses démarches visant à prévenir les risques liés au covid-19, par exemple, en cas de contrôle de l'inspection du travail (c. trav. art. L. 8113-5). L'employeur pourrait motiver l'absence de télétravail par la nature même des activités (Q/R « Télétravail »), mais aussi, à notre sens, par des considérations techniques, financières ou encore organisationnelles.

Le seul fait de vouloir organiser des réunions, même managériales, ne saurait justifier de ne pas télétravailler, dès lors que ces réunions peuvent facilement être organisées en audio ou visioconférence (instr. DGT du 3 novembre 2020, § 1.1). À l'inverse, le télétravail n’est pas applicable pour des activités attachées à des lieux ou des personnes, qui impliquent de se rendre sur des lieux spécifiques pour inspecter, nettoyer, installer, réparer ou utiliser des outils et machines ou encore s’occuper de personnes ou d’animaux (Q/R « Télétravail » du ministère du Travail).

Risques pour les entreprises refusant le télétravail

Responsabilité civile

6-13

Dans le cadre de l'épidémie de covid-19, les recommandations du protocole sanitaire permettent la déclinaison matérielle de l'obligation de sécurité de l'employeur (CE 19 octobre 2020, n° 444809). Ainsi, un employeur qui, alors que son activité s’y prête, refuserait de mettre en place le télétravail pourrait, selon le ministère, engager sa responsabilité au nom de son obligation légale de sécurité, en fonction des conditions d’exercice du travail et des mesures de prévention mises en place dans l’entreprise, (Q/R « Télétravail » du ministère du Travail). Il lui serait possible d'échapper à une condamnation à verser des dommages-intérêts s'il prouvait avoir pris toutes les mesures requises par le code du travail (ex. : mesures de prévention) (c. trav. art. L. 4121-1 et L. 4121-2 ; cass. soc. 25 novembre 2015, n° 14-24444, BC V n° 234).

Pour rappel, les juges en cas de contentieux, se prononcent in concreto, au regard de la nature des tâches exercées par le salarié et des mesures de protection prises par l'employeur. Quelle sera donc la position des juges si l'employeur refuse le télétravail, mais respecte par ailleurs toutes les recommandations du protocole sanitaire sur les mesures à mettre en place dans l'entreprise (ex. : mise à disposition de masques, gel hydroalcoolique, distanciation physique, bureaux individuels, horaires aménagés, etc.) ?

Si une infection au virus est prise en charge au titre d’une maladie professionnelle, la faute inexcusable de l’employeur pourrait être retenue seulement s’il était démontré que celui-ci avait conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’avait pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver (« Responsabilité de l’employeur - Droit de retrait », www.travail-emploi.gouv.fr).

Droit de retrait

6-14

Un salarié pourrait se placer sur le terrain de l’article L. 4133-1 du code du travail pour se retirer d’une situation qu’il estime dangereuse pour sa santé et sa sécurité.

L’appréciation de la pertinence de cette décision en cas de contestation serait laissée à l’appréciation du juge.

De même, le CSE peut également être à l’initiative d’une telle action dans le cadre des articles L. 4132-1 et suivants du code du travail.

Responsabilité pénale

6-15

L'employeur pourrait voir sa responsabilité pénale engagée notamment en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui ou en cas de manquement à son obligation de sécurité s'il est établi qu'il n'a pas accompli les diligences normales (c. pén. art. 121-3).

Ainsi, l’employeur qui ne peut instaurer le télétravail mais qui met à la disposition des salariés des moyens de protection (ex. : distanciation, gel hydroalcoolique) et tout autre moyen recommandé par les pouvoirs publics, les informe sur la prévention des risques de contamination (ex. : rappel des gestes barrière) en adaptant leur formation à la situation de l’entreprise et à la nature des postes occupés ne devrait pas encourir de sanction pénale, sous réserve de l’appréciation des juges (« Sécurité et santé des travailleurs : les obligations générales de l’employeur et sa responsabilité », www.travail-emploi.gouv.fr).

6-16

LE CONTRÔLE DE L'INSPECTION DU TRAVAIL

L’inspection du travail veille au respect du protocole sanitaire en entreprise, lequel prévoit notamment le recours au télétravail quand il est possible (instr. DGT du 3 novembre 2020, § 1.1). Le cas échéant, les inspecteurs du travail contrôlent l'entreprise « en fonction des situations réelles de travail et des activités exercées ». Ils sont invités à « faciliter la recherche de solutions dans le cadre du dialogue social ».

Dans les situations de risque avéré et de non-respect des principes généraux de prévention, l'employeur pourra être mis en demeure par le DREETS (remplace le DIRECCTE depuis le 1er avril 2021) de respecter son obligation légale de sécurité (c. trav. art. L. 4121-1, L. 4121-2, L. 4721-1 et L. 4721-4). S'il ne donne pas suite, il pourra se voir notifier un procès-verbal constatant son infraction et rappelant les sanctions applicables (c. trav. art. L. 8113-7).

Quiz Télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure

6-17

Testez vos connaissances !

Ce quiz vous permet de déterminer l’étendue de vos connaissances sur le télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure.

QUESTIONS

1. L'employeur peut imposer le télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure.

Vrai / Faux

2. En cas de circonstances exceptionnelles, l'employeur doit négocier un accord ou élaborer une charte pour mettre en place le télétravail.

Vrai / Faux

3. L'ANI du 26 novembre 2020 conseille d'anticiper, dans l'accord ou la charte sur le télétravail, les conditions et les modalités de mobilisation du télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure.

Vrai / Faux

4. Dans le contexte de la crise sanitaire, le protocole sanitaire élaboré par les pouvoirs publics énumère un certain nombre de règles relatives au télétravail qui s'imposent à l'employeur.

Vrai / Faux

5. Dans le contexte de la crise sanitaire, l'employeur a pu consulter le CSE après, et non pas avant, avoir mis en œuvre le télétravail.

Vrai / Faux

6. Le salarié peut imposer à l'employeur de passer en télétravail en cas de circonstances exceptionnelles.

Vrai / Faux

7. Le salarié peut exercer son droit de retrait si l'employeur lui refuse le télétravail dans un contexte de circonstances exceptionnelles.

Vrai / Faux

8. Dans le contexte de la crise sanitaire, l'employeur qui refuse de mettre en place le télétravail alors que son activité s'y prête risque d'engager sa responsabilité pénale.

Vrai / Faux

RÉPONSES

1. L'employeur peut imposer le télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure.

Vrai. Il s'agit d'une mesure collective de prévention des risques professionnels. Voir § 6-2.

2. En cas de circonstances exceptionnelles, l'employeur doit négocier un accord ou élaborer une charte pour mettre en place le télétravail.

Faux. Dans le cadre de circonstances exceptionnelles, le télétravail peut être organisé sans formalisme particulier. Voir § 6-4.

3. L'ANI du 26 novembre 2020 conseille d'anticiper, dans l'accord ou la charte sur le télétravail, les conditions et les modalités de mobilisation du télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure.

Vrai. Cela permet de garantir la continuité de l'activité de l'entreprise. Voir § 6-5.

4. Dans le contexte de la crise sanitaire, le protocole sanitaire élaboré par les pouvoirs publics énumère un certain nombre de règles relatives au télétravail qui s'imposent à l'employeur.

Faux. Le protocole édicte uniquement un ensemble de recommandations à l'égard des employeurs. Il n'a pas de portée obligatoire. Voir § 6-6.

5. Dans le contexte de la crise sanitaire, l'employeur a pu consulter le CSE après, et non pas avant, avoir mis en œuvre le télétravail.

Vrai. L'employeur a été provisoirement autorisé à consulter le CSE a posteriori sur la mise en œuvre du télétravail. Voir § 6-9.

6. Le salarié peut imposer à l'employeur de passer en télétravail en cas de circonstances exceptionnelles.

Faux. Même dans ce contexte, le salarié ne peut pas imposer à l'employeur de télétravailler. Voir § 6-10.

7. Le salarié peut exercer son droit de retrait si l'employeur lui refuse le télétravail dans un contexte de circonstances exceptionnelles.

Vrai. Le salarié peut se placer sur le terrain du droit de retrait s'il estime que la situation est dangereuse pour sa santé et sa sécurité. Voir § 6-14.

8. Dans le contexte de la crise sanitaire, l'employeur qui refuse de mettre en place le télétravail alors que son activité s'y prête risque d'engager sa responsabilité pénale.

Vrai. La responsabilité pénale de l'employeur peut être engagée sur le terrain de la mise en danger ou du manquement à son obligation de sécurité. Voir § 6-15.