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Parution: septembre 2024

5 - Le régime des apports partiels d’actif

(CGI art. 210-0 A, 210 B, 817, 817 A et 817 B)

Source à consulter : BOFiP-IS-FUS

La technique utilisée par une société pour filialiser des activités précédemment exercées est celle de l’apport partiel d’actif à une nouvelle société créée à cet effet

Un régime fiscal de faveur (régime spécial des fusions) est prévu par la législation concernant les apports de cette catégorie

Entre autres avantages, il permet de bénéficier d’un sursis d’imposition pour les plus-values constatées à l’occasion de ces opérations

En quoi consiste-t-il ?

L’apport partiel d’actif est l’opération par laquelle une société apporte des éléments de son actif à une autre société moyennant la remise de titres représentatifs du capital social de la société bénéficiaire de l’apport. À la différence d’une fusion ou d’une scission, l’apport partiel d’actif n’entraîne pas la disparition de la société apporteuse.

En principe, l’apport d’un établissement ou d’une branche d’activité entraîne les mêmes conséquences fiscales qu’une cessation partielle d’activité, à savoir :

- La taxation des plus-values afférentes aux éléments transmis. Cette taxation porterait en l’occurrence sur la différence entre la valeur réelle des éléments faisant l’objet de l’apport et la valeur qu’avaient ces derniers dans les comptes de la société. Cette même valeur réelle des éléments apportés serait à retenir pour la détermination de la plus-value réalisée par la société apporteuse en cas de cession des parts ou actions reçues en contrepartie de son apport ;

- La réintégration des provisions. En effet, selon la jurisprudence, en cas de cessation d’activité ou de cession d’une entreprise, les provisions qu’elle avait constituées deviennent sans objet du fait même de cette cessation d’activité ou cession et doivent, dès lors, être rapportées aux résultats de son dernier exercice.

Cependant, dès lors que l’apport partiel d’actif porte sur une branche complète d’activité, il peut être placé sous le régime spécial des fusions. Il en va de même en l’absence d’apport d’une branche complète d’activité, mais cette fois sous réserve de l’obtention d’un agrément de l’administration des impôts.

Les conséquences de l’application du régime spécial des fusions à l’apport partiel d’actif doivent être examinées du double point de vue de la société apporteuse et de la société bénéficiaire de l’apport.

Quelles conséquences pour la société apporteuse ?

- Les plus-values afférentes à l’ensemble des éléments d’actif apportés ne sont pas soumises à l’impôt sur les sociétés. Cette exonération concerne tant les éléments de l’actif immobilisé, amortissable ou non, que les autres éléments de l’actif (stocks, titres de créances négociables…) ;

- En cas de cession par la société des parts ou actions reçues en contrepartie de l’apport, sa plus-value imposable est calculée par différence entre le prix de vente de ces titres et la valeur que les biens apportés comportait, du point de vue fiscal, dans ses propres écritures. Ainsi, le prix d’acquisition venant en déduction du prix de vente est constitué par la valeur nette comptable des actifs apportés avant toute réévaluation pouvant résulter du traité d’apport.

Bien entendu, si les titres cédés répondent à la définition des titres de participation et sont détenus depuis plus de deux ans par la société, cette plus-value peut bénéficier du régime prévu par l’article 219, I-a du CGI (« niche Copé ») et donc n’être soumise à l’impôt sur les sociétés qu’à hauteur de 12 % de son montant.

Pour la détermination de la nature à court terme ou à long terme de cette plus-value (moins de deux ans ou plus de deux ans), le délai de détention est décompté à partir de la date d’inscription des titres à l’actif de la société apporteuse.

- Dès lors qu’elles conservent leur objet, les provisions pour dépréciation ou pour risques et charges constituées par la société n’ont pas à être réintégrées dans son résultat imposable. Ces provisions doivent être reprises au bilan de la société bénéficiant des apports.

Quelles conséquences pour la société bénéficiaire de l’apport ?

- Les biens apportés doivent être repris au bilan de la société bénéficiaire de l’apport pour la valeur qu’ils avaient dans les écritures de la société apporteuse et, le cas échéant, continuer à être amortis à partir de leur valeur d’origine.

- En cas de cession par la société des biens qui lui avaient été apportés, sa plus-value imposable est calculée par différence entre leur prix de cession et la valeur pour laquelle ils avaient été repris au bilan, diminuée le cas échéant des amortissements pratiqués depuis l’apport.

Quels avantages procure-t-il ?

Les avantages attachés à l’option pour le régime spécial des fusions sont de plusieurs ordres :

Un sursis d’imposition pour la plus-value d’apport

L’avantage le plus évident du régime de faveur réside dans une neutralisation de l’opération d’apport : aucune plus-value donnant lieu à taxation n’est constatée dans l’immédiat. Une imposition au titre des plus-values n’intervient qu’au moment de la revente des titres reçus en rémunération de l’apport et ne porte alors que sur 12 % de la plus-value réalisée si les conditions d’application du régime d’exonération des plus-values à long terme sur titres de participation (« niche Copé ») sont remplies.

Les titres de la société bénéficiaire de l’apport attribuables en franchise d’impôt aux associés de la société apporteuse

Par ailleurs, sous réserve du respect de deux conditions, une répartition des titres reçus en contrepartie d’un apport partiel d’actif placé sous le régime spécial des fusions entre les associés de la société apporteuse peut être réalisée sous un régime de neutralité fiscale :

- D’une part, la société apporteuse doit disposer encore au moins d'une branche complète d’activité après l’apport ;

- D’autre part, la répartition entre les associés de la société apporteuse des titres représentatifs de l’apport partiel d’actif doit être proportionnelle à leurs droits dans le capital de cette société et avoir lieu dans un délai d’un an calculé de date à date à compter de la réalisation de l’apport.

Pour le calcul de la plus-value de revente de ces titres, leur prix d’acquisition est retenu pour une valeur nulle. Le gain net imposable est donc égal au prix de cession diminué, le cas échéant, des frais de vente.

Une exonération de droits d’enregistrement

Enfin, alors que les apports « à titre onéreux » sont normalement soumis aux droits d’enregistrement, la prise en charge du passif de la société apporteuse par la société bénéficiaire de l’apport placé sous le régime spécial des fusions ne donne ouverture à aucun droit.

Quelle est son utilité ?

Comme nous l’avons vu en première partie de cet ouvrage, la filialisation d’activités exercées précédemment au sein d’une structure juridique unique peut répondre à des préoccupations très diverses de la part des dirigeants de cette dernière. Dans de nombreux cas, l’objectif est de permettre une meilleure lisibilité des résultats des différentes branches d’activité. Dans d’autres, de les doter d’une autonomie de gestion. Dans d’autres, de préparer une cession, etc.

En conférant une neutralité à ces opérations, le régime des apports partiels d’actif supprime tout obstacle d’ordre fiscal à leur réalisation.

Une fois son apport partiel d’actif réalisé, la société apporteuse, devenue société holding, pourra en fonction des circonstances opter pour le régime des sociétés mères et filiales ou celui de l’intégration fiscale. Dès lors que la société bénéficiaire de l’apport aura été créée pour les besoins de cette opération - et constituera donc sa filiale à 100 % - la société apporteuse pourra opter pour l’un et l’autre régime.

Quelles sont les conditions à remplir ?

- L’opération doit intervenir entre ses sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés

- Elle doit en principe porter sur une branche complète d’activité

Pour pouvoir bénéficier de plein droit du régime spécial des fusions une opération d’apport en société doit porter sur une branche complète d’activité, définie par l’administration comme « l’ensemble des éléments d’actif et de passif d’une division d’une société qui constituent, du point de vue de l’organisation, une exploitation autonome, c’est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens » (BOFiP-IS-FUS-20-20).

Une division autonome se caractérise par l’existence d’une clientèle, de personnels et d’installations et, le cas échéant, de services administratifs propres. En d’autres termes, elle doit constituer :

- Une organisation distincte des autres divisions de la société apporteuse (critère de l’autonomie interne) ;

- Un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens dans des conditions pouvant être considérées comme normales dans le secteur économique considéré (critère de l’autonomie externe).

Rappelons que les apports partiels d’actif ne portant pas sur une branche complète d’activité sont également susceptibles de bénéficier du régime spécial des fusions, mais cette fois dans le cadre d’un agrément administratif.

La branche complète d’activité ne peut pas comprendre un patrimoine étranger à l’exploitation.

Quelles obligations déclaratives ?

L’option pour le régime spécial des fusions est formulée dans le traité d’apport.

Un état de suivi doit être souscrit par la société apporteuse et la société bénéficiaire des apports au titre de chaque exercice aussi longtemps qu’un élément auquel est attaché un sursis d’imposition reste inscrit à l’actif de leur bilan.

L’état de suivi souscrit par la société apporteuse comprend, pour l’exercice de l’apport, les éléments apportés et les titres reçus en échange et, pour les exercices suivants, les titres reçus en échange. Celui souscrit par la société bénéficiaire de l’apport concerne les éléments d’actif apportés.

Quelles limites ?

Placées sous une clause anti-abus spécifique par l’article 210-0 A, III du CGI, les opérations d’apports partiels d’actif ayant comme objectif principal ou comme un de leurs objectifs principaux la fraude ou l’évasion fiscale sont exclus du bénéfice du régime de faveur.

Signalons que les entreprises peuvent demander à l’administration, préalablement à la réalisation de l’opération, la confirmation que cette exclusion ne leur est pas applicable, l’absence de réponse dans un délai de six mois valant accord (procédure de rescrit prévue à l’article L 80 B du Livre des procédures fiscales).