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Parution: avril 2022

Signature et déroulement du bail

Le contrat

Promesse et projet de bail

Promesse de bail

Conditions de validité

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Lorsque l’une ou l’autre des parties ne peut prendre ou donner immédiatement les locaux, une promesse de bail peut, dans un premier temps, être signée. Cette promesse peut ainsi être envisagée lorsqu'un élément nécessaire à la formation définitive du bail manque : autorisation administrative de transformer les locaux, délivrance d’une licence, obtention de la carte de commerçant ou engagement de caution.

Le recours à une promesse peut également se concevoir lorsque le locataire en place a donné congé ou a refusé le renouvellement et que son départ est programmé dans quelques mois.

À la différence d’un projet (sur le projet de bail, voir § 18), la promesse de bail lie :

-soit l’une des parties : le bailleur s’il donne à bail, le locataire s’il s’engage à prendre en location. La partie au bénéfice de qui cette promesse unilatérale est consentie sera engagée lorsqu’elle lèvera l’option (la technique est la même que pour les promesses de vente) ;

-soit les deux parties, dès lors que bailleur et locataire s’engagent définitivement à donner en location et à prendre en location. Cette promesse, dite « synallagmatique », vaut bail.

Pour être valable, la promesse doit comporter les éléments essentiels d’un contrat de bail : désignation des biens, durée et date d’entrée en jouissance, loyer avec ses modalités de paiement et de révision, dépôt de garantie.

En pratique, lorsque c’est possible, les clauses du bail seront négociées et arrêtées, réduisant ainsi le passage de la promesse au bail à une formalité.

Promesse unilatérale. L'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, qui a réformé le code civil, a mis fin à une solution que les juges appliquaient dans le cadre des promesses unilatérales : ils refusaient la réalisation forcée du contrat lorsque la levée de l'option intervenait postérieurement à la rétractation du promettant (cass. civ., 3e ch., 11 mai 2011, n° 10-12875). Depuis le 1er octobre 2016, la solution inverse est intégrée dans le code civil : « la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis » (c. civ. art. 1124).

Condition suspensive

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La promesse de bail contiendra le plus souvent une condition suspensive liée à l’élément manquant : l’autorisation administrative manquante, la caution exigée, le versement d’une somme à titre de droit d’entrée (le bail peut également comporter cette condition)… La réalisation de cette condition sera enfermée dans un délai précis, de sorte que si l’événement ne se réalise pas dans le temps prévu, l’engagement des parties sera caduc et si le preneur a versé une somme « pour réserver l’affaire », celle-ci devra lui être restituée.

  • Licence de débit de boissons. La validité d’un bail était soumise à la condition que le candidat locataire obtienne la licence de quatrième catégorie. L’intéressé, ayant été condamné pour des faits visés par le code des débits de boissons, n’a finalement pas pu obtenir la licence. Les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, ont considéré que la condition était toutefois accomplie dans la mesure où aucun terme n’avait été fixé pour l’accomplissement de la condition et que le candidat locataire était le seul à connaître l’interdiction qui le frappait (cass. civ., 3e ch., 19 avril 2000, n° 98-19187).

  • Mise en service d’une installation classée. Une société commerciale a conclu avec une SCI un bail commercial portant sur un immeuble en état futur d’achèvement d’entrepôt et de bureaux, prenant effet au jour de la livraison de l’immeuble. L’immeuble constituait une installation classée dont la mise en service était subordonnée à une autorisation administrative. La demande de permis de construire déposée par la SCI n’a pas eu de suite, faute qu’y soit annexé, conformément à la réglementation, le récépissé de la demande de mise en service de l’installation classée.

    Les juges ont retenu que le bail commercial était soumis à une condition suspensive d’autorisation administrative puisque, aux termes de ce contrat, le preneur devait s’assurer de détenir les autorisations nécessaires à l’exercice de ses activités et faisait son affaire de l’obtention de ces autorisations. Or, la société commerciale n’avait pas demandé la mise en service de l’établissement classé que devait constituer l’entrepôt à construire, si bien que la demande de permis de construire, déposée par la SCI (à laquelle n’était pas annexé le récépissé de la demande de mise en service de l’établissement classé), ne pouvait avoir de suite.

    Les juges en ont conclu que la condition suspensive n’avait pas été réalisée du seul fait de la défaillance de la société commerciale (cass. civ., 3e ch., 28 octobre 2009, n° 08-19454).

Projet de bail

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Le projet de bail s'envisage lorsque, contrairement à la promesse de bail (voir § 16), aucune circonstance n'empêche une signature immédiate du bail. L'idée ici est de prendre quelques jours pour examiner les conditions du bail.

Ainsi, le candidat locataire demandera au bailleur, ou au rédacteur du bail, un projet du contrat de bail pour examen. Le bailleur le lui communiquera parfois spontanément.

Cette démarche du locataire n’a rien d’exorbitant et évite les longues discussions au cours du rendez-vous de signature. Elle répond, par ailleurs, à un souci d’information du locataire.

Le locataire doit étudier le projet et le comparer à d’autres contrats qu’il a en sa possession ou qu’il a pu se procurer. Pour toute difficulté, le locataire consultera un spécialiste.

Le locataire est en droit de faire des contre-propositions et de négocier certaines clauses (voir §§ 29 à 42).

Le formalisme du bail

Rédaction d’un écrit

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L'application du statut des baux commerciaux n'est pas subordonnée à la signature d'un écrit (cass. civ., 3e ch., 12 février 1985, n° 83-11728).

Le contrat de bail n’est soumis à aucune formalité spéciale. Il peut être établi par acte sous seing privé ou notarié.

Le bail comporte généralement une clause selon laquelle les frais d’établissement du contrat et de ses avenants seront à la charge du locataire. Le locataire doit demander le montant des honoraires éventuellement dus pour la rédaction du bail. Les honoraires étant libres en ce domaine, il peut les négocier.

  • Bail verbal. Le bail verbal relève du statut et a une durée minimale de 9 ans. Il est néanmoins à déconseiller, car il pose des problèmes de preuve, notamment quant aux activités autorisées ou aux obligations respectives des parties. En outre, le bail verbal est inopposable à l’acquéreur de l’immeuble. C’est ainsi qu’un occupant d’un hôtel meublé, en vertu de locations verbales prouvées au moyen de quittances, n’est pas fondé à invoquer un contrat de location autonome opposable au propriétaire de l’immeuble (cass. civ., 3e ch., 12 juillet 2000, n° 98-20134). A été censurée la décision d’une cour d’appel exigeant un commencement de preuve par écrit d’un bail verbal, sans avoir recherché si ce bail avait reçu exécution (cass. civ., 3e ch., 13 mars 2002, n° 00-15194).

    La seule occupation des lieux, non accompagnée du paiement d’un loyer, ne suffit pas à caractériser l’existence d’un bail commercial verbal, qui suppose l’accord des parties sur la chose et le prix du loyer (cass. civ., 3e ch., 4 mars 2008, n° 07-15522). Cet accord des parties fait également défaut lorsque l'occupation des lieux est certes doublée d'un paiement, mais que celui-ci est intervenu trois mois après que le propriétaire a fait connaître sa renonciation à signer le bail et alors que le potentiel locataire n'a pas signé le projet de bail reçu lors des pourparlers (cass. civ., 3e ch., 20 mai 2021, n° 19-24658).

  • Bail électronique. L’écrit sous forme électronique est admis en preuve, au même titre que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité (c. civ. art. 1366). La fiabilité d'un procédé de signature électronique est présumée, jusqu'à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique qualifiée. Est une signature électronique qualifiée une signature électronique conforme au règlement européen 910/2014 du 23 juillet 2014 (décret 2017-1416 du 28 septembre 2017, art. 1er).

  • Acte notarié. Le bail notarié a force probante jusqu’à inscription de faux (c. civ. art. 1371). Par ailleurs, l'acte notarié revêtu de la formule exécutoire constitue un titre exécutoire (c. proc. civ. exéc. art. L. 111-3, 4°). Toutefois, rien n'empêche un créancier, titulaire d'un acte notarié, de demander en justice la condamnation du débiteur au paiement de la créance constatée dans l'acte, par exemple lorsque la validité de l'acte est discutée (cass. civ., 2e ch., 18 février 2016, n° 15-13991).

    Le bail concernant un débit de boissons doit nécessairement revêtir la forme authentique (CGI art. 504).

    Celui qui a une durée supérieure à 12 ans doit revêtir la forme notariée ou être déposé aux rangs des minutes d’un notaire (voir § 32).

  • Acte sous signature privée. Lorsque le bail est établi par un acte sous signature privée (avant la réforme du code civil entrée en vigueur le 1er octobre 2016, on parlait d'« acte sous seing privé »), il doit être rédigé en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intérêt distinct (c. civ. art. 1375). Pour un bail, deux originaux sont généralement nécessaires, l’un pour le bailleur, l’autre pour le preneur. Ce nombre minimal augmentera s’il y a plusieurs bailleurs ou plusieurs copreneurs, chacun devant avoir un original. L'acte préciser le nombre d'originaux.

    La date sera portée sur les originaux, mais à défaut d’enregistrement de l’acte, elle n’a, envers le tiers, aucune valeur probante. Lorsque les parties ne signent pas le même jour l’acte, deux dates seront portées sur l’acte.

    Le lieu de la signature (ou les lieux, si l’acte n’est pas signé en un lieu unique) sera traditionnellement indiqué, bien qu’aucun texte ne l’exige.

    La mention « lu et approuvé » précédant la signature manuscrite est dépourvue de toute portée, mais elle est traditionnelle.

    Le bail sous seing privé, même rédigé par un avocat, n’a pas la force exécutoire et, avant toute poursuite, le bailleur devra rendre, par une décision de justice, son bail exécutoire. Le bailleur pourra procéder, au vu de son titre, à une saisie conservatoire des biens du locataire défaillant, mais il ne pourra appréhender les sommes saisies sans avoir, au préalable, rendu son titre exécutoire.

  • Acte contresigné par un avocat. Lorsque l’avocat contresigne un acte sous seing privé, il atteste avoir pleinement éclairé la ou les parties qu’il conseille sur les conséquences de l’acte (loi 71-1130 du 31 décembre 1971, art. 66-3-1). Le contreseing de l’avocat a une force probatoire supérieure à celle de l’acte sous seing privé classique. En effet, l'acte sous signature privée contresigné par un avocat fait foi de l'écriture et de la signature des parties, tant à leur égard qu'à celui de leurs héritiers ou ayant-cause (c. civ. art. 1374). L'acte contresigné par avocat a moins de force qu'un acte authentique. Il ne constitue jamais un titre exécutoire permettant une saisie.

Enregistrement

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Les baux d’immeubles ne sont pas obligatoirement enregistrés. Lorsque les parties requièrent la formalité pour donner date certaine à l’acte un droit fixe de 25 € s'applique (c. civ. art. 1377 ; CGI art. 739 ; BOFiP-ENR-DG-20-30-30-10-§ 20-05/04/2017).

Position du locataire

Position du bailleur

L’enregistrement peut être utile pour le locataire afin de rendre le bail opposable à un acquéreur éventuel de l’immeuble (1). Cette formalité, qui confère une date certaine à l’acte au jour de son enregistrement, peut en outre être utile afin d’opposer à un tiers, et notamment à l’administration fiscale, la date du bail.

L’enregistrement de l’acte, conférant une date certaine, fixe avec certitude la date de naissance du privilège du bailleur sur les biens mobiliers appartenant au locataire. En cas de concours avec d’autres créanciers privilégiés sur les mêmes biens, le rang du bailleur sera facilement déterminable.

(1) Si le bailleur vend la chose louée, l’acquéreur ne peut expulser le locataire qui a un bail authentique ou dont la date est certaine (c. civ. art. 1743, al. 1er).

Le bailleur

Propriétaire ou locataire principal

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Le bailleur est, le plus souvent, le propriétaire des murs. Il est le locataire principal titulaire du bail s’il sous-loue les locaux (la sous-location est étudiée §§ 271 à 284).

Le bail commercial conférant au locataire un droit au renouvellement ou à une indemnité d’éviction produit des conséquences dépassant le simple acte d’administration qui caractérise un bail classique.

Locaux accessoires. Lorsque le locataire loue des locaux accessoires à un bailleur autre que le propriétaire de son local principal, ce second bailleur doit donner en location en pleine connaissance de l’utilisation du local (voir notre modèle ci-dessous). À défaut, il risque de ne pas être soumis au statut des baux commerciaux (cass. civ., 3e ch., 19 mars 2008, n° 06-21752).

Déclaration du bailleur à insérer dans le bail de locaux accessoires

Le bailleur reconnaît expressément que les locaux, objets du présent bail, sont loués à titre de locaux accessoires et en vue d’une utilisation jointe d’un local principal situé à …, et ayant fait l’objet d’un bail au profit du preneur aux présentes en date du …, consenti par … .

Le bailleur déclare, en conséquence, être parfaitement informé que les locaux présentement loués bénéficient des dispositions du code de commerce relatives aux baux commerciaux.

Bailleur usufruitier

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L’usufruitier ne peut, sans le concours du nu-propriétaire, donner à bail un immeuble à usage commercial, industriel ou artisanal. À défaut d’accord du nu-propriétaire, l’usufruitier peut être autorisé par justice à passer seul cet acte (c. civ. art. 595, al. 4).

L’infraction à la règle impérative de l’article 595 précité entraîne la nullité du bail à l’égard du nu-propriétaire qui peut invoquer celle-ci sans attendre la fin de l’usufruit (cass. civ., 3e ch., 26 janvier 1972, n° 70-12594).

Le concours du nu-propriétaire est également exigé pour le renouvellement du bail commercial (cass. civ., 3e ch., 24 mars 1999, n° 97-16856) ou encore pour un bail de courte durée (cass. civ., 3e ch., 5 avril 1995, n° 93-16963 ) (sur ces baux, voir § 851) ; ce dernier arrêt rappelle que le locataire doit vérifier les pouvoirs du bailleur. L'usufruitier ne peut pas davantage consentir par un avenant une réduction du loyer sans l'accord du nu-propriétaire (cass. civ., 3e ch., 14 mars 2019, n° 17-27560).

  • Nullité relative du bail. La nullité du bail commercial consenti par un usufruitier sans le concours du nu-propriétaire est une nullité relative. Elle ne peut donc être invoquée que par le nu-propriétaire. Elle ne peut pas l’être par le nouveau propriétaire de l’immeuble auquel le nu-propriétaire a vendu l’immeuble après le décès de l’usufruitier (cass. civ., 3e ch., 14 novembre 2007, n° 06-17412).

  • Autorisation judiciaire. Pour accorder ou non l’autorisation sollicitée par l’usufruitier qui se heurte à un refus du nu-propriétaire, le juge apprécie souverainement si la location est de nature à devenir préjudiciable au nu-propriétaire (cass. civ., 3e ch., 4 mars 1987, n° 85-17667 ; arrêt rendu à propos d’un bail à ferme qui est soumis aux mêmes règles pour l’usufruit et la nue-propriété). A été autorisé à conclure seul un bail commercial sur des parcelles agricoles l’usufruitier des terres, dès lors que le bail obéissait à la nécessité d’adapter les activités agricoles à l’évolution économique et à la réglementation sur la protection de l’environnement ; ce bail était profitable à l’indivision, sans porter atteinte aux droits des nus-propriétaires, dans la mesure où le preneur s’engageait, en fin de bail, à remettre les lieux dans leur état d’origine (cass. civ., 3e ch., 2 février 2005, n° 03-19729).

Indivisaire

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Le régime de l’indivision a été modifié par la loi 2006-728 du 23 juin 2006. Les nouvelles dispositions, entrées en vigueur le 1er janvier 2007, sont applicables aux indivisions existantes à cette date (par dérogation, les conventions d’indivision conclues avant cette date restent valables).

Donner à bail un local commercial (puis renouveler ce bail) nécessite le consentement de tous les indivisaires (c. civ. art. 815-3, al. 7).

Un mandat tacite donné par un des indivisaires à un autre ne permet pas de valider la conclusion (ou le renouvellement) d’un bail commercial (c. civ. art. 815-3, dern. al.). En revanche, il paraît possible, comme par le passé, de donner un mandat spécial pour la conclusion (ou le renouvellement) d’un bail commercial.

Si un indivisaire est hors d’état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter en justice à le représenter (c. civ. art. 815-4, al. 1). Par ailleurs, un indivisaire peut être autorisé à conclure seul un bail commercial (ou à le renouveler seul) si le refus du coïndivisaire met en péril l’intérêt commun (c. civ. art. 815-5, al. 1).

Rédaction de l'acte. Le bail ne doit pas être conclu au nom ou pour le compte de l'indivision. En effet, le bail serait alors nul car l'indivision n'a pas de personnalité juridique (cass. civ., 3e ch., 9 juin 2011, n° 10-19241). Toutefois, le locataire ne peut pas se prévaloir de la nullité si le bail a reçu un commencement d'exécution (cass. civ., 3e ch., 16 mars 2017, n° 16-13063).

Époux

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Si le signataire du bail propriétaire du local est marié sous le régime de la séparation des biens, il est habilité à signer seul le bail. Toutefois, l’intervention du conjoint s’impose si l’immeuble loué appartient en indivision aux deux époux.

Les époux mariés sous le régime de la communauté ne peuvent, l’un sans l’autre, donner à bail un immeuble à usage commercial, industriel ou artisanal dépendant de la communauté (c. civ. art. 1425).

Si un époux conclut un tel bail sans l’accord de son conjoint, ce dernier peut en demander l’annulation pendant 2 années à partir du jour où il a eu connaissance du bail, sans jamais pouvoir la demander plus de 2 ans après la dissolution de la communauté (c. civ. art. 1427).

  • Immeuble propre à l’un des époux. L’immeuble donné à bail constitue un bien propre de l’époux bailleur soit qu’il l’a reçu par succession ou donation, soit parce qu’il l’a acquis avant le mariage ou au cours du mariage en emploi ou remploi de biens eux-mêmes propres. Le conjoint, dans ce cas, n’a pas à intervenir à l’acte de bail mais c’est à l’époux bailleur de prouver le caractère propre du bien ; à défaut, le bien est présumé commun (c. civ. art. 1402, al. 1er).

  • Pacsés. Quelle que soit la date de conclusion du pacte civil de solidarité, il convient de se référer à l'acte d'achat des murs objets du bail. Cet acte indiquera si le bien a été acquis ou non en indivision par les partenaires.

Mineurs

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Lorsque l’immeuble appartient à un mineur, celui-ci ne peut consentir le bail.

Les deux parents peuvent consentir, au nom du mineur, un bail soumis aux dispositions du code de commerce sur les baux commerciaux (cass. civ., 1re ch., 18 octobre 1994, n° 92-21735). À défaut d'accord entre eux, ils doivent demander l'autorisation du juge des tutelles. Cette autorisation doit également être demandée lorsque le projet consiste à louer aux parents un immeuble appartenant à l'enfant (c. civ. art. 387-1).

Le bail consenti par un tuteur au nom d’un mineur ne confère au preneur à l’encontre du mineur devenu majeur aucun droit au renouvellement ou à se maintenir dans les lieux à l’expiration du bail (c. civ. art. 504, al. 3).

À noter également que le tuteur ne peut prendre à bail les biens du mineur, sauf autorisation du conseil de famille (c. civ. art. 508 et 509).

Majeur incapable

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Le majeur placé sous sauvegarde de justice conserve l’exercice de ses droits (c. civ. art. 435). Les actes qu’il passe peuvent être rescindés pour lésion ou réduits pour excès (alors même qu’ils pourraient être annulés pour insanité d’esprit en vertu de l’article 414-1 du code civil). Les tribunaux prennent notamment en considération l’utilité ou l’inutilité de l’opération, l’importance ou la consistance de patrimoine de la personne protégée et la bonne ou mauvaise foi de ceux avec qui elle a contracté.

Seul le majeur protégé peut agir en rescision ou en réduction (c. civ. art. 435, dern. al.). La prescription de l’action est de 5 ans. Au décès du majeur, ses héritiers deviennent titulaires de l’action.

Le majeur sous sauvegarde de justice ne peut pas conclure de bail commercial si un mandataire spécial a été désigné par le juge à cet effet ; le bail conclu par le majeur sous sauvegarde serait nul.

S’agissant d’un majeur sous tutelle, le tuteur ne peut, sans y être autorisé par le conseil de famille ou, à défaut, par le juge, faire des actes de disposition au nom de la personne protégée (c. civ. art. 505, al. 1). Il ne peut ainsi conclure sans autorisation un bail de plus de 9 ans, ni un bail (quelle que soit sa durée) présentant un risque anormal pour le patrimoine du majeur protégé, ses prérogatives ou son mode de vie (décret 2008-1484 du 22 décembre 2008).

Par ailleurs, les baux consentis par le tuteur ne confèrent au preneur, à l’encontre de la personne protégée devenue capable, aucun droit à renouvellement ou à se maintenir dans les lieux à l’expiration du bail, quand bien même il existerait des dispositions légales contraires. Ces dispositions ne sont toutefois pas applicables aux baux consentis avant l’ouverture de la tutelle et renouvelés par le tuteur (c. civ. art. 504, al. 3).

Quant au majeur sous curatelle, il ne peut faire, sans l’assistance du curateur, aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait l’autorisation du juge ou du conseil de famille (c. civ. art. 467, al. 1). Il ne peut ainsi conclure, sans l’assistance du curateur, un bail de plus de 9 ans, ni un bail (quelle que soit sa durée) présentant un risque anormal pour son patrimoine, ses prérogatives ou son mode de vie. Toutefois, le juge peut prévoir que la personne en curatelle pourra effectuer seule un tel acte, pour lequel le code civil requiert normalement l’assistance du curateur (c. civ. art. 471).

Les actes irréguliers sont sanctionnés de la façon suivante (c. civ. art. 465) :

-si la personne protégée a accompli seule un acte pour lequel elle aurait dû être assistée, l’acte peut être annulé si elle a subi un préjudice ;

-si la personne protégée a accompli seule un acte pour lequel elle aurait dû être représentée, l’acte est nul de plein droit, sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice.

En pratique, il est conseillé de faire déclarer au bailleur qu’il a la pleine capacité pour conclure un bail commercial, tant il est difficile de connaître les mesures de protection pouvant entourer une personne protégée, sauf à demander un extrait d’acte de naissance avec mentions marginales.

Propriétaire et mandataire apparents

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Le bail consenti par le propriétaire apparent de la chose louée est opposable au véritable propriétaire lorsque le locataire a traité de bonne foi sous l’emprise de l’erreur commune (cass. civ., 3e ch., 21 janvier 1981, n° 79-13854).

La propriété apparente, ou mandat apparent, est invoquée par la suite lorsque le véritable propriétaire conteste la validité du bail ; elle ne peut servir que comme argument de défense et, en aucun cas, comme une technique de signature du contrat.

Ce recours à la propriété apparente peut permettre de valider un acte conclu par une personne non habilitée à le faire.

Mais si des recherches élémentaires avaient pu éviter l’erreur commise par le locataire sur le cocontractant, tel un usufruitier se qualifiant de propriétaire, celui-ci n’a pas la qualité de propriétaire apparent (cass. civ., 3e ch., 15 janvier 1992, n° 90-16496).

Les juges du fond doivent préciser les circonstances qui auraient autorisé le preneur à croire en la qualité de mandataire du signataire du bail et ne peuvent se limiter au fait que le locataire a pu légitimement croire que le signataire agissait en vertu d’un mandat de ses parents, puis de sa mère après le décès de son père (cass. civ., 3e ch., 10 juin 1998, n° 96-20484).

Depuis le 1er octobre 2016, le tiers qui doute de l'étendue du pouvoir du représentant conventionnel à l'occasion d'un acte qu'il s'apprête à conclure, peut demander par écrit au représenté de lui confirmer, dans un délai qu'il fixe et qui doit être raisonnable, que le représentant est habilité à conclure cet acte. L'écrit mentionne qu'à défaut de réponse dans ce délai, le représentant est réputé habilité à conclure cet acte (c. civ. art. 1158).

  • Avocat. L’avocat d’un bailleur qui a négocié les conditions d’un bail avec son autorisation est titulaire d’un mandat, sans avoir à produire un mandat exprès (cass. civ., 1re ch., 12 mai 1993, n° 91-12445).

  • Mandataire professionnel. Le mandataire professionnel qui rédige un bail est tenu de vérifier la qualité exacte du mandat qu’il engage dans un acte juridique et il est personnellement responsable envers les tiers lésés des fautes qu’il a commises (cass. civ., 1re ch., 13 octobre 1992, n° 91-10619). En l’espèce, un bail commercial avait été conclu sans l’accord de la nue-propriétaire et en attribuant aux bailleresses, simples usufruitières, la fausse qualité de propriétaire.

  • Vente des locaux. Prive de tout effet le congé donné par un locataire en raison de l’erreur sur l’identité du bailleur ; il importe peu que, suite à la vente des murs, le nouveau propriétaire ait conservé le même représentant que son prédécesseur et que le congé ait été délivré à ce représentant (cass. civ., 3e ch., 4 juillet 2001, n° 99-21314).

Bailleur personne morale

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Une société commerciale (SA, SAS, SARL), propriétaire de locaux à usage commercial, peut être amenée à les louer. Le bien loué n’aura plus la même valeur qu’il aurait eue libre de toute « propriété commerciale ». C’est donc un acte important que le dirigeant (gérant ou président ou personne déléguée par eux) peut consentir en s’attachant à fixer un loyer correspondant à une valeur locative réelle, pratiquée sur le marché. Il convient de vérifier, dans les statuts, si le dirigeant est libre de consentir un tel acte.

Pour les SCI, la situation est différente car la conclusion de baux entre normalement dans leur objet social. Le gérant est habilité à consentir un bail commercial régulier sur les biens appartenant à la société. Des considérations très particulières peuvent limiter, dans les statuts, les pouvoirs en ce domaine.

  • Restrictions statutaires. Les fondateurs de la société peuvent avoir inséré dans les statuts une clause selon laquelle le dirigeant doit, à titre de règle interne, être préalablement habilité pour consentir un bail commercial ; une semblable restriction peut aussi résulter de l’acte de nomination du gérant. Ces clauses sont certes inopposables aux tiers, mais il n’en demeure pas moins que le dirigeant qui passerait outre engagerait sa responsabilité vis-à-vis de la société.

  • Conventions réglementées. Lorsque le bail est conclu entre deux sociétés et que la procédure des conventions réglementées doit être respectée en raison des intérêts que le dirigeant de l’une des sociétés détient dans l’autre société, la signature d’un avenant est également soumise à la procédure des conventions réglementées (cass. com. 25 mars 2003, n° 99-15470).

  • Bail signé au nom d'un gérant décédé. Même si le gérant de la SCI propriétaire était décédé au moment du bail, le preneur ne peut pas invoquer cette irrégularité pour se soustraire à ses engagements et refuser de payer le loyer. La nullité d'un contrat fondée sur l'absence de pouvoir du mandataire social, qui est relative, ne peut être demandée que par la partie représentée. (cass. civ., 1re ch., 12 novembre 2015, n° 14-23340).

  • Société en redressement judiciaire. Il est imprudent de conclure avec une entreprise en redressement sans demander la signature de l'administrateur judiciaire. L'arrêt suivant en est une illustration.

    Une société fabriquant des meubles avait été mise en redressement judiciaire et un administrateur avait été nommé. Quelque temps après, la société donnait un hangar en location pour 1 an, sans l'assistance de l'administrateur, à une société qui voulait y entreposer du bois. Précisons que ce n'était pas la première fois que le fabricant louait ce hangar. Le fabricant est ensuite mis en liquidation et la société locataire, qui n'a plus accès aux locaux, demande à récupérer son stock de bois.

    Certes, une société en redressement judiciaire peut exercer, sans l'assistance de l'administrateur judiciaire, les actes de gestion courante (c. com. art. L. 622-3). Cependant, les juges considèrent que la location d'un hangar à bois n'est pas un acte de gestion courante pour un fabricant de meubles. Ils concluent que la locataire ne peut pas se prévaloir du bail auprès du liquidateur (cass. com. 29 septembre 2015, n° 14-17374).

L’état des lieux

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Le bailleur est tenu, en principe, de fournir le bien loué en bon état de réparation de toute espèce (c. civ. art. 1720, al. 1er). Cette disposition a un caractère supplétif et il y est généralement dérogé pour les baux commerciaux par une clause selon laquelle le locataire prend les lieux en l’état (voir § 101).

Depuis le 20 juin 2014, suite à l'intervention de la loi 2014-626 du 18 juin 2014 dite « loi Pinel », un état des lieux doit être établi contradictoirement et amiablement par le bailleur et le locataire (ou par un tiers mandaté par eux) lors de la prise de possession des locaux par le preneur. Si l'état des lieux ne peut être établi amiablement, il doit l'être par un huissier, sur l'initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire. L'état des lieux est joint au bail ou, à défaut, conservé par chacune des parties (c. com. art. L. 145-40-1).

Il ne peut être dérogé à l'obligation de dresser un état des lieux et la clause du bail qui aurait pour objet d'en dispenser les parties, sera réputée non écrite (voir § 42).

  • Sanction du bailleur. L'article 1731 du code civil dispose que « s'il n'a pas été fait d'état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire ». Cependant, la « loi Pinel » est venue préciser que si le bailleur n'a pas fait toutes diligences pour la réalisation de l'état des lieux, il ne peut pas invoquer la présomption de l'article 1731 du code civil (c. com. art. L. 145-40-1, al. 3).

  • Clause du bail. La clause contractuelle, selon laquelle le locataire est présumé avoir pris les lieux en bon état de toute réparation, est valable. Mais ceci ne suffit pas à décharger le bailleur de son obligation de délivrance (cass. civ., 3e ch., 20 janvier 2009, n° 07-20854).

  • Rien à signaler. Lorsqu’un état des lieux d’entrée fait apparaître la mention « rien à signaler », le preneur devra restituer les lieux dans un état n’appelant également pas d’observation, sauf à démontrer que les désordres sont dus à la vétusté ou à la force majeure (cass. civ., 3e ch., 20 décembre 1995, n° 93-20288).

Position du locataire

Position du bailleur

Le locataire a tout intérêt à mentionner, sur l’état des lieux, toutes les dégradations, salissures et l’état de chaque pièce, en faisant noter toutes les anomalies.

En fin de bail, le bailleur opposera au locataire l’état des lieux d’entrée ; il n’aura pas à apporter la preuve que les désordres constatés au moment du départ du locataire sont de son fait. Ce sera au locataire à prouver que les dégâts sont dus à la vétusté ou antérieurs à son entrée en jouissance.

Au moment de son départ, l’état des lieux d’entrée lui sera opposé et s'il n’a pas fait d’observation, il devra restituer les locaux dans le même état que celui dans lequel il les a pris, c’est-à-dire en bon état (certains bailleurs vont jusqu’au parfait état). Toutefois, il pourra démontrer que les désordres constatés dans l’état des lieux de sortie sont dus à la vétusté ou apporter la preuve que les locaux loués étaient en mauvais état dès l’origine.

Si des travaux de remise en état des locaux empêchent toute relocation, le locataire peut être condamné à indemniser le bailleur pour la perte de loyer qui en résulte.

Le bailleur n’a pas à faire l’avance du coût des travaux de remise en état qui incombent au preneur (cass. civ., 3e ch., 11 décembre 1991, n° 90-15246).

La désignation des locaux

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Le preneur doit visiter avec attention les locaux. Plusieurs visites sont généralement nécessaires. Il est d’usage de mentionner, dans le bail, que le preneur déclare parfaitement connaître les lieux pour les avoir visités.

Les locaux, objet du bail, doivent être décrits de façon précise.

L’adresse exacte sera portée sur le bail. Si l’immeuble a deux ou plusieurs entrées, les différents numéros sur la ou les rues seront indiqués. Les parties ne se limiteront pas à l’adresse postale, elles se référeront au titre de propriété du bailleur (acte d’achat ou de partage, attestation immobilière suite à un décès, règlement de copropriété).

Les conditions d’accès aux locaux loués feront l’objet d’une attention toute particulière lorsque celles-ci sont réglementées. Quand la livraison des marchandises et matériels doit s’effectuer selon des modalités particulières, celles-ci seront indiquées. De même, les issues de secours seront précisées. Les dépendances et locaux annexes (caves, greniers, garages, places de stationnement, appentis) compris dans la location seront mentionnés et décrits.

Un plan ou un schéma colorié délimitera utilement les locaux, objet du bail.

  • Surface. Le plus souvent, aucune indication de surface n’est portée dans le bail, afin d’éviter les litiges liés aux différences de surfaces.

    Lorsque le bail est conclu avec indication de contenance, il y a lieu à modification du loyer lorsque l’excédent ou le déficit de contenance réelle par rapport à la contenance indiquée est au moins d’un vingtième, à moins qu’il résulte des éléments de la cause ou de l’acte que les parties n’attachent aucune importance à l’indication de la contenance.

    Cette règle est prévue pour les baux à ferme (c. civ. art. 1765) mais non pour les baux commerciaux. Toutefois, il convient d’être prudent et si les parties veulent fixer le loyer commercial au m2, elles ont tout intérêt à préciser leur mode de calcul et à envisager une marge d’erreur.

    Dans les centres commerciaux, le loyer de base est généralement calculé par rapport à une superficie, selon la méthode dite « Gross Leasing Area » ou « GLA ».

  • Immeuble en copropriété. Pour les locaux dépendant d’un immeuble soumis au statut de la copropriété, les parties se référeront au règlement de copropriété pour la désignation du ou des lots donnés à bail.

    Les tantièmes de copropriété et de charges affectés aux lots loués seront également mentionnés, afin de permettre un contrôle des dépenses de charges et de travaux.

    Si le local donné à bail bénéficie d’un droit d’usage exclusif d’une partie commune (entrée, couloir, W-C, jardinet, etc.), mention en sera faite. De même, seront indiqués les locaux ou éléments d’équipement dont le locataire a l’usage avec d’autres occupants (réserves, courette, monte-charge…).

    La description des locaux figurant dans le règlement de copropriété (ou dans les titres de propriété) ne correspondra pas toujours à la consistance actuelle des locaux. C’est l’état actuel des locaux qui sera décrit.

    Le bail interdira au preneur d’encombrer les parties communes de l’immeuble, celles-ci n’étant pas comprises dans la location (même si la surface louée comprend tout un niveau, le palier et les dégagements restent des parties communes).

  • Location d’usines ou d’ateliers. Les baux d’usines ou d’ateliers sont également soumis aux dispositions du statut des baux commerciaux.

    Pour ce type de location, une description très précise des bâtiments et des emprises s’impose.

    Les potentialités offertes par les infrastructures seront mises en évidence.

    Les éléments d’équipement ou les matériels fixés seront décrits et les conditions d’utilisation précisées.

    La conformité des locaux et installations aux normes de sécurité et d’hygiène sera indiquée dans les détails.

    La nature des constructions, les matériaux utilisés pour leur édification seront répertoriés. La présence ou non d’amiante fera l’objet de diagnostic précis.

  • Location de bureaux. Les bureaux bénéficient du statut des baux commerciaux dans la mesure où le preneur y exerce une activité commerciale.

    Cependant, la location pour un usage de bureaux exclut, en principe, la réception et la vente de marchandises et les clauses du bail doivent être adaptées en conséquence (sur ces questions, voir §§ 403 et 404).

    Un usage exclusif de bureaux entraînera un déplafonnement du loyer lors des renouvellements du contrat (voir § 679).

    Lorsque le bail est affecté à usage exclusif de bureaux, il y a lieu de surveiller la rédaction du bail et :

    -d’exclure le terme « magasin », « boutique » ou « commerce » dans la désignation des lieux et dans les clauses du bail ;

    -de prévoir que les lieux seront garnis par du mobilier de bureau, et non par du matériel et des marchandises en quantité et qualité suffisantes, selon l’expression habituelle ;

    -de condamner les phrases telles que « le preneur pourra céder ou sous-louer en tout ou partie son droit au bail pour tous commerces ou toutes activités de son choix ». L’autorisation de cession ne pourra concerner qu’un usage exclusif de bureaux, de manière à conserver la même affectation et, éventuellement, le même secteur d’activité.

Le bail tous commerces ou pour une activité précise

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Les parties définissent d’un commun accord les activités que le preneur pourra exercer dans les locaux, dans les limites prévues par le règlement de copropriété (ou le cahier des charges du lotissement) ou des règles d’urbanisme.

C’est la destination donnée dans l’acte qui fixe les droits des parties et non l’usage que le locataire a pu faire de la chose louée.

En cours de bail, le locataire pourra adjoindre des activités complémentaires, sous réserve de respecter la procédure de déspécialisation partielle (voir §§ 451 à 460). Cette extension, souvent par avenant, peut permettre au bailleur d’obtenir une augmentation de loyer lors de la prochaine révision triennale. Le changement total d’activité, ou déspécialisation plénière (voir §§ 461 à 477), est soumis à une procédure plus lourde et peut entraîner le paiement d’une indemnité, motivant, par là même, une augmentation de loyer.

Tout changement de destination en cours de bail, non autorisé par le bailleur, est de nature à entraîner la résiliation du bail.

Une détermination précise de la ou des activités devant être exercées dans le local est essentielle.

Bail d’activité exclusive. Lorsque le bail contient une activité précise autorisée, le preneur ne peut exercer que cette activité. Le bail peut aussi autoriser plusieurs activités précises, mais qui restent bien délimitées dans un secteur d’activité.

Lorsque le preneur est une personne morale, l’activité autorisée au bail doit être conforme à l’objet social de la société.

Position du locataire

Position du bailleur

Le locataire a tout intérêt à demander un maximum d’activités. Il vérifiera que l’activité prévue dans le bail coïncide avec celle qu’il doit exercer. S’il entend exercer à brève échéance des activités complémentaires, il les mentionnera dans la clause.

La limitation des activités autorisées permet au bailleur d’exercer un contrôle et d’ouvrir une négociation pour tout changement d’activité sortant du cadre de la destination prévue au bail.

Le bailleur ne pourra pas interdire au locataire la cession de son droit au bail à un successeur dans les activités autorisées au bail. Mais si un candidat acquéreur exerce une activité distincte, il devra négocier l’autorisation de cession du bail avec le bailleur.

Bail tous commerces. Une telle clause permet au preneur d’exercer dans les lieux n’importe quelle activité non contraire aux bonnes mœurs, dès lors qu’elle n’est pas interdite par le règlement de copropriété, la destination de l’immeuble et dans la mesure où cette activité s’exerce conformément aux règles administratives en vigueur (hygiène et sécurité, par exemple).

Parfois, le bail stipule tous commerces, à l’exception d’une activité précise telle que la restauration ou les commerces d’alimentation.

Position du locataire

Position du bailleur

• L’autorisation d’exercer tous commerces augmente les possibilités de cession dans la mesure où le preneur peut librement céder son droit au bail pour l’exercice de toute activité, sous réserve qu’elle soit commerciale et dans la limite des clauses du bail et, s’il y a lieu, du règlement de copropriété.

• Une telle clause ne peut pas permettre un changement d’affectation des locaux. Des locaux à usage de bureaux doivent rester à cet usage et ne peuvent être cédés pour en faire un atelier, une boutique ou un magasin de vente.

• Le locataire, en dépit de l’autorisation qui lui est donnée d’exercer tous commerces, vérifiera la clause du projet de bail relative à la cession. En effet, si la clause de cession n’autorise celle-ci qu’au successeur propriétaire du fonds exploité dans les lieux ou pour la même activité que celle effectivement exercée par le preneur au moment de la cession, les effets de la clause tous commerces seront paralysés.

• Si la cession du bail tous commerces intervient au cours de la dernière période triennale, l’acquéreur qui exerce une activité différente de celle du cédant ne pourra prétendre au renouvellement de son bail.

• La clause tous commerces confère un blanc-seing au preneur pour la cession de son fonds ou l’exercice d’autres activités dans les limites du bail.

• Lorsque les locaux sont à usage exclusif de bureaux, la clause tous commerces ou toutes activités est de nature à remettre en cause le caractère d’usage exclusif de bureaux ; le déplafonnement du loyer renouvelé sur ce fondement risque d’être contesté (cass. civ., 3e ch., 14 mars 1979, n° 77-11567 ; voir aussi cass. civ. 18 février 1998, n° 96-11955). En revanche, la clause « tous commerces » n’est pas incompatible avec le caractère monovalent du local permettant un déplafonnement (cass. civ., 3e ch., 27 novembre 2002, n° 01-10625 ; cass. civ., 3e ch., 3 décembre 2003, n° 02-12266 ; cass. civ., 3e ch., 3 novembre 2005, n° 04-16376).

• L’autorisation de pouvoir exercer tous commerces ou toutes activités est généralement donnée en contrepartie d’un droit d’entrée ou d’un loyer élevé.

• Cet élément est pris en compte dans le cadre du calcul de la valeur locative (hausse de 15 % à 20 %) lors d’une révision ou d’un renouvellement, en application de l’article R. 145-8 du code de commerce.

Durée du bail

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Le bail commercial ne peut avoir une durée inférieure à 9 ans (c. com. art. L. 145-4, al. 1er). Depuis le 20 juin 2024, la clause du bail qui déroge à cette durée minimale de 9 ans, est réputée non écrite (voir § 42).Toutefois, le locataire a, en principe, la faculté de donner congé à l’expiration de chaque période triennale (voir § 491).

Seuls les baux dérogatoires (voir § 851), les conventions d’occupation précaire (voir § 871) et les locations saisonnières (voir § 901) ont une durée inférieure à 9 ans.

Les baux dits « à périodes », c’est-à-dire conclus pour une durée de 3, 6, 9 années, avec possibilité de donner congé à l’expiration de chaque période, ne sont possibles que dans la mesure où la première période est d’au moins 9 ans (c. com. art. L. 145-9). Cette première période peut être suivie d’un nombre défini de périodes de 3 ans (cass. civ., 3e ch., 1er juillet 1998, n° 96-21831).

Le premier bail peut être consenti pour une durée supérieure : 10, 11, ou 12 ans, mais il sera renouvelable pour une durée de 9 ans, sauf accord des parties pour une durée plus longue. Cette disposition est d’ordre public (c. com. art. L. 145-12). Il appartient aux parties, lors de chaque renouvellement, d’exprimer formellement leur volonté particulière, faute de quoi le bail est renouvelé pour la durée légale de 9 ans (cass. civ., 3e ch., 18 juin 2013, n° 12-19568).

Position du locataire

Position du bailleur

Le locataire a intérêt à refuser un bail pour une durée supérieure à 9 ans, car les règles du plafonnement prévues pour les loyers renouvelés ne sont pas applicables aux baux dont la durée contractuelle est supérieure à 9 ans.

Ainsi, le loyer d’un bail consenti et accepté pour une durée de 9 ans et un trimestre échappe aux règles du plafonnement du loyer renouvelé. Le loyer renouvelé est calculé selon la valeur locative.

Le bailleur a tout intérêt à négocier un bail d’une durée supérieure à 9 ans. En effet, au moment du renouvellement, le loyer ne sera pas indexé en fonction de la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux, mais sera calculé en fonction de la valeur locative.

  • Baux de plus de 12 ans. Si la durée du bail est supérieure à 12 ans, l’acte doit être obligatoirement publié au bureau des hypothèques du lieu de l’immeuble pour être opposable aux tiers.

    Cette publication implique la nécessité soit d’établir le bail par acte authentique, soit de le déposer au rang des minutes d’un notaire, avec reconnaissance d’écriture et de signature.

    La taxe de publicité foncière est perçue au taux de 0,70 %. Elle est liquidée sur le prix exprimé, augmenté des charges imposées au preneur, ou sur la valeur locative réelle des biens loués si cette valeur est supérieure au prix augmenté des charges. Elle est due sur le montant cumulé de toutes les années à courir (CGI art. 742).

    En raison des frais, le preneur refusera généralement de signer un bail de plus de 12 ans. Par ailleurs, un tel bail (comme tout bail de plus de 9 ans) entraînerait automatiquement le déplafonnement du loyer lors de son renouvellement.

  • Bail perpétuel. Un bail perpétuel est entaché d’une nullité d’ordre public. Le bail dont le terme dépend de la volonté du preneur seul est perpétuel (cass. civ., 3e ch., 13 mars 2002, n° 99-14152). Au cas considéré, le bail relatif à une résidence pour personnes âgées était conclu pour une durée de 3, 6 ou 9 ans à la volonté du preneur seul, à charge pour lui de prévenir le bailleur de son intention de faire cesser le bail au moins 6 mois à l’avance par simple lettre recommandée.

  • Baux commerciaux dans les résidences de tourisme. Les baux commerciaux signés entre les propriétaires et les exploitants de résidence de tourisme ont une durée minimale de 9 ans, sans possibilité de résiliation à l’expiration d’une période triennale (c. com. art. L. 145-7-1). Ce texte, ajouté par la loi 2009-888 du 22 juillet 2009, est d'ordre public et s'applique aux baux signés avant comme après la publication de cette loi (cass. civ., 3e ch., 9 avril 2017, n° 16-10350).

Clauses à connaître

Clause d’exploitation personnelle

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La clause interdisant au preneur de confier l'exploitation du fonds de commerce à une autre personne entraîne la prohibition de toute location-gérance. En revanche, la clause imposant une occupation personnelle des lieux loués n’a pas pour objet d’empêcher le locataire de mettre son fonds en location-gérance (cass. civ., 3e ch., 14 novembre 2002, n° 01-12455). De même, la clause interdisant de concéder la jouissance des lieux n'interdit pas au preneur de mettre le fonds en location-gérance (cass. civ., 3e ch., 23 janvier 2007, n° 06-10191). Par ailleurs, la clause interdisant la mise en location-gérance n'interdit pas la sous-location (cass. civ., 3e ch., 23 mai 1995, n° 93-13120).

Exercice d’une activité conforme aux règlements

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Le locataire doit exercer son activité en conformité avec les différentes réglementations qui lui sont applicables. Il ne pourra pas se prévaloir de mesures administratives pour interrompre son exploitation ou ne pas payer le loyer (sur l'impact des interdictions d'ouverture pendant la pandémie de covid-19 voir §§ 1040 à 1049). Lorsqu’elle est due à la faute du preneur, la fermeture administrative du fonds de commerce n’est pas un cas de force majeure.

Travaux. Lorsque des décisions administratives imposent la réalisation de travaux, ceux-ci sont normalement à la charge du bailleur s’ils ont pour objet de rendre les lieux conformes à leur destination.

Mais, lorsque le bail prévoit que le locataire s’oblige à satisfaire, sans recours possible contre le bailleur, aux charges de ville, police et voirie, et notamment à exécuter les travaux prescrits par l’administration pour cause d’hygiène et de salubrité ou autres, le locataire a accepté de prendre à sa charge l’ensemble des travaux imposés au bailleur et en particulier les travaux de mise aux normes de sécurité des établissements recevant du public (cass. civ., 3e ch., 23 juin 1993, n° 91-12297).

Activité permanente

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L’article L. 145-8 du code de commerce exige, sauf motifs légitimes, une exploitation effective au cours des 3 années qui précèdent l’expiration du bail ou sa reconduction.

En pratique, le bailleur, pour se garantir, exige une exploitation effective pendant toute la durée du bail.

  • Résiliation. La non-exploitation du commerce est une cause de résiliation du bail, dans la mesure où l’exploitation figure parmi les obligations expressément imposées au locataire (cass. civ., 3e ch., 15 mars 1989, n° 87-20287). En l’absence d’une stipulation expresse du bail faisant obligation au preneur d’exploiter son fonds de commerce, le bailleur ne peut pas introduire une action en résiliation de celui-ci (cass. civ., 3e ch., 19 mai 2004, n° 02-20243).

  • Force majeure. La force majeure exonère le débiteur de son obligation. Est un cas de force majeure un événement échappant au contrôle du débiteur qui l'empêche d'exécuter son obligation dès lors que (c. civ. art. 1218, al. 1er) :

    -cet événement ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat ;

    -ses effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées.

  • Garnissement de matériel et mobilier. Il existe encore aujourd’hui une clause imposant au preneur de tenir les locaux loués constamment garnis de meubles, effets mobiliers et matériels en quantité et valeur suffisantes. Le but de cette clause est de permettre au bailleur de rendre effectif son privilège en cas de défaillance du preneur. Toutefois, cette clause est sans utilité lorsque le locataire a recours soit au crédit-bail pour financer les investissements mobiliers ou de matériel, soit à un prêt garanti par un nantissement sur le matériel et l’outillage. Dans ces différents cas, le privilège du bailleur est primé par celui des organismes financiers.

Autorisation de travaux

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Très souvent, le bail soumet à autorisation préalable la réalisation de travaux ; cette clause doit être respectée par le preneur, qui demandera l’autorisation du bailleur et, éventuellement, fera intervenir l’architecte du bailleur, si le bail le prévoit. À défaut, il s’expose au paiement des frais de remise en état, voire à la résiliation de son bail (voir §§ 117 à 121).

Indivisibilité du bail

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La clause d’indivisibilité du bail, souvent au seul bénéfice du bailleur, peut correspondre à une situation matérielle des locaux, ceux-ci étant matériellement indivisibles.

Elle peut aussi reposer sur une simple manifestation de volonté du bailleur, dans un souci de faire échec à une revendication par un sous-locataire éventuel à la propriété commerciale envers lui. Le sous-locataire n’a alors de droits qu’envers le locataire principal.

La clause d’indivisibilité peut également être invoquée par le preneur lors d’un renouvellement de son bail dans la mesure où le bailleur n’offrirait le renouvellement que pour une partie des locaux loués, tels que ceux à usage commercial, et non pour ceux affectés à l’habitation compris dans le bail à renouveler.

  • Démembrement des locaux. En présence d’un bail unique portant sur différents locaux vendus, en cours de bail, à des propriétaires différents dont l’un a donné congé à l’expiration du bail avec refus de renouvellement moyennant indemnité, la Cour de cassation a précisé que l’indivisibilité cesse à l'expiration du bail (cass. civ., 3e ch., 12 janvier 2005, n° 03-19255).

  • Locaux d’habitation. Le locataire peut faire échec au droit de reprise des locaux d’habitation loués accessoirement à des locaux commerciaux défini à l’article L. 145-23-1 du code de commerce s’il démontre que la privation de jouissance du local d’habitation apporte un trouble grave à l’exploitation de son fonds de commerce ou lorsque le local commercial et le local d’habitation forment un tout indivisible.

Interdiction de modifier la consistance des locaux

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Cette clause ne fait que rappeler une des obligations du preneur. En effet, en l’absence de clause précise sur les travaux, le preneur peut apporter les modifications nécessaires aux besoins de son exploitation. Toutefois, ces travaux ne doivent pas porter atteinte au gros œuvre ni à la consistance des locaux (voir § 118).

Dépose d’une devanture. La dépose d’une devanture pour en modifier l’habillage ne constitue pas une modification dans la distribution des lieux (cass. civ., 3e ch., 19 décembre 2000, n° 99-13120).

Modifications – Tolérances

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Il s’agit d’une clause classique selon laquelle le bailleur précise que toute modification apportée au bail ne pourra résulter d’une situation passive de sa part face à un événement contraire aux dispositions du contrat. De même, si le bailleur a parfaitement connaissance d’une infraction ou du non-respect d’une clause du bail, le locataire ne pourra s’en prévaloir à son encontre.

Le bailleur entend, par cette clause, n’accorder une portée juridique qu’aux modifications ayant donné lieu à un accord exprès ou écrit.

Accord tacite. En fait, il pourra résulter des circonstances que le bailleur, par son attitude, a connu et accepté sans équivoque un événement. Tel peut être le cas d’une cession irrégulière. Les juges du fond interprètent souverainement si l’attitude du bailleur a ou non couvert une irrégularité en ce domaine (cass. civ., 3e ch., 4 novembre 1987, n° 86-13356).

Visite du bailleur

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Le bailleur ne peut pas pénétrer dans les lieux loués. Il ne peut pas garder un double des clés. Toute infraction serait considérée comme une violation de domicile.

En revanche, le bail peut instaurer un droit de visite au profit du bailleur ou son représentant. Ce droit de visite peut être général, le libre accès des locaux étant admis chaque fois que le bailleur le jugera utile, et notamment en cas de congé, ou enfermé dans des conditions strictes : information préalable du preneur, neutralisation de certaines périodes gênantes pour l’activité du preneur, etc.

La clause de restitution des locaux en fin de bail prévoit généralement un droit de visite 2 ou 3 mois avant la fin de la location.

Vie privée. En pénétrant dans les locaux loués, le bailleur porte atteinte au respect de la vie privée de son locataire et lui doit réparation (cass. civ., 3e ch., 25 février 2004, n° 01-18081).

Arbitrage

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Sous réserve des dispositions législatives particulières, la clause compromissoire est valable dans les contrats conclus à raison d’une activité professionnelle (c. civ. art. 2061). Cette clause a pour effet de confier les contentieux, qui naîtront de l'exécution du contrat, à des arbitres et non aux juges judiciaires.

Le bail commercial peut donc prévoir que les litiges relatifs à l’application ou à l’interprétation du bail seront soumis à un arbitrage. Encore faut-il que les deux parties (bailleur et locataire) aient conclu le bail commercial en raison d’une activité professionnelle. Toutefois, dans le cas d'un contrat international, la clause d'arbitrage est valable même si l'une des parties n'est pas commerçante (cass. civ., 1re ch., 30 mars 2004, n° 02-12259) et même si elle n'agit pas dans un cadre professionnel (cass. civ., 1re ch., 21 mai 1997, n° 95-11427).

Par ailleurs, l’arbitrage ne pourra porter sur des litiges relatifs aux dispositions d’ordre public des baux commerciaux, à savoir : fixation du loyer révisé, droit au renouvellement et modalités des congés, durée du bail, déspécialisation, cession à l’acquéreur du fonds.

En revanche, les litiges inhérents aux rapports locatifs tels que les troubles de jouissance, charges, travaux peuvent être réglés par voie d’arbitrage ; il en est de même de la fixation du loyer renouvelé, qui n’est pas d’ordre public.

Cession de fonds de commerce. Deux retraités cèdent leur fonds de commerce et consentent un bail commercial à l'acheteur. Ces contrats comportent une clause compromissoire. Quelque temps après, un litige apparaît entre les vendeurs et l'acheteur. Celui-ci désigne un arbitre mais les vendeurs, quant à eux, s'y refusent. La Cour de cassation leur donne raison : les vendeurs n'exerçaient plus aucune activité professionnelle lorsqu'ils ont signé les deux contrats. Les contrats n'ont donc « pas été conclus en raison d'une activité professionnelle au sens de l'article 2061 du code civil, de sorte que la clause compromissoire était nulle et de nul effet » (cass. civ., 1re ch., 29 février 2012, n° 11-12782).

Clauses réputées non écrites

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Protecteur des droits du locataire, le statut des baux commerciaux contient un certain nombre de dispositions d’ordre public auxquelles les parties ne peuvent pas déroger (voir dans l'encadré ci-dessous la liste des clauses à de ce fait proscrire).

La sanction des clauses contraires à ces dispositions d'ordre public est prévue aux articles L. 145-15 et L. 145-16 du code de commerce, lesquels ont été modifiés par la loi 2014-626 du 18 juin 2014, dite « loi Pinel » :

-avant l'intervention de la « loi Pinel », ces clauses étaient déclarées nulles. Or l'action en nullité d'une clause du bail est soumise à la prescription de 2 ans (c. com. art. L. 145-60).

-depuis la réforme, elles sont réputées non écrites, ce qui écarte toute prescription.

La Cour de cassation a jugé que l'article L. 145-15 du code de commerce dans sa version issue de la « loi Pinel » s'applique aux baux en cours et que l'action tendant à voir réputer non écrite une clause du bail n'est pas soumise à prescription. Autrement dit, peu importe la date de signature du bail, dès lors que l'action visant à voir réputer non écrite une de ses clauses est formée après l'entrée en vigueur de la « loi Pinel », soit après le 20 juin 2014, elle est recevable (cass. civ., 3e ch., 19 novembre 2020, n° 19-20405).

Clauses à proscrire

Sont réputées non écrites les clauses ci-après (c. com. art. L. 145-15 et L. 145-16) :

• Clause fixant la durée du bail à moins de 9 ans (c. com. art. L. 145-4).

• Clause faisant échec au droit au renouvellement (c. com. art. L. 145-15).

• Clause interdisant au preneur la cession de son bail à l’acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise (c. com. art. L. 145-16, al. 1er) ou encore, à compter du 15 mai 2022, au bénéficiaire du transfert universel de son patrimoine professionnel (c. com. art. L. 145-16 modifié par la loi 2022-172 du 14 février 2022).

• Clause interdisant la révision judiciaire du loyer (c. com. art. L. 145-37).

• Clause faisant échec aux règles de la révision (c. com. art. L. 145-38 et L. 145-39).

• Dépôt de garantie stipulant que le locataire n’a pas droit aux intérêts alors que son montant dépasse deux termes de loyer (c. com. art. L. 145-40).

• Clause dispensant d'état des lieux (c. com. art. L. 145-40-1).

• Clause dispensant le bailleur de l'inventaire des charges, ainsi que des états prévisionnel et récapitulatif des travaux (c. com. art. L. 145-40-2).

• Clause permettant la résiliation de plein droit du bail à défaut de paiement du loyer dans un délai inférieur à 1 mois après un commandement de payer demeuré infructueux (c. com. art. L. 145-41).

Clause permettant d’invoquer la cessation d’activité pour justifier une résiliation du bail pendant le temps nécessaire à la réalisation des transformations admises dans le cadre de la déspécialisation (c. com. art. L. 145-42, al. 1er).

• Clause faisant échec à la déspécialisation (c. com. art. L. 145-47 à L. 145-54).