L'arrivée du terme
Le bailleur dénie le statut
Appréciation des conditions liées au statut
Cas de contestation du statut
Le bailleur peut contester le droit au statut au moment du renouvellement du bail dans les cas suivants :
-non-inscription du preneur au RCS (voir § 714) ;
-défaut d’exploitation du fonds (voir § 716) ;
-sous-location interdite ou sans autorisation (voir § 726).
Mais il ne peut plus invoquer la qualité d'étranger du locataire (voir § 732).
Revendication du statut par le preneur. De son côté, le locataire peut souhaiter revendiquer le statut des baux commerciaux pour un bail intitulé « professionnel ». Dans un tel cas, il doit impérativement agir en justice dans les 2 ans de la conclusion du contrat (c. com. art. L. 145-60). Passé ce délai, son action sera déclarée prescrite (cass. civ., 3e ch., 23 novembre 2011, n° 10-24163).
Date à retenir
Le bailleur peut refuser le statut et le droit au renouvellement lorsque le locataire ne remplit pas les conditions (voir § 711) :
-soit à la date de délivrance du congé par le bailleur ;
-soit à la date de demande de renouvellement par le locataire.
Défaut d’inscription au RCS. Le locataire non inscrit au registre du commerce et des sociétés à la date de délivrance du congé (et non de prise d’effet de celui-ci) ou n’ayant pas la qualité de commerçant à cette date pourra se voir dénier le droit au renouvellement (cass. civ., 3e ch., 1er octobre 1997, n° 95-15842) (voir §§ 714 et 715) ; lorsque le droit au renouvellement n’est pas en jeu, le défaut d’immatriculation ne remet pas en jeu le bail, soumis aux dispositions relatives au statut des baux commerciaux, qui continue à régir les relations entre les parties (cass. civ., 3e ch., 1er octobre 2003, n° 02-10381) (voir § 348).
Maintien des conditions tout au long de la procédure. Le locataire doit continuer à remplir l’ensemble de ces conditions tout au long de la procédure de renouvellement du bail soit jusqu’à la conclusion du nouveau bail renouvelé, soit jusqu’à la fixation de l’indemnité d’éviction en cas de refus de renouvellement (voir § 771). Toutefois, s’agissant de l’immatriculation au RCS, il faut que le locataire soit régulièrement immatriculé à la date du congé délivré par le bailleur et, à la date d’effet de ce congé, il n’est pas exigé une immatriculation continue entre les deux événements (voir § 715).
Mise en œuvre de la dénégation du statut
Le bailleur peut se prévaloir d’une condition d’inapplicabilité du statut, lors de la délivrance du congé, 6 mois avant la fin du bail ou même après avoir offert le renouvellement avec indemnité (voir § 590). Ainsi, le bailleur, qui a offert le paiement d'une indemnité d'éviction après avoir exercé son droit d'option, peut encore dénier au locataire le droit au statut des baux commerciaux tant qu'une décision définitive n'a pas été rendue sur la fixation de l'indemnité d'éviction (cass. civ., 3e ch., 7 septembre 2017, n° 16-15012).
Une mise en demeure n’est généralement pas nécessaire dans les cas de dénégation du statut, le locataire ne pouvant régulariser l’absence d’une condition essentielle du droit au renouvellement (voir §§ 752 et 753).
Le statut des baux commerciaux contesté in extremis. Un propriétaire ayant délivré à son locataire un congé sans offre de renouvellement, le locataire saisit la justice pour obtenir le paiement d'une indemnité d'éviction. Le propriétaire conteste alors l'application du statut des baux commerciaux et s’oppose en conséquence à la demande du locataire. Les juges donnent tort au bailleur. Selon eux, la contestation du bailleur, qui estime, en cours d'instance, que le bail conclu avec le locataire n'est pas un bail commercial, est en contradiction avec le congé qu'il a fait délivrer. La Cour de cassation censure l'analyse des juges : un bailleur qui a délivré un congé avec refus de renouvellement peut, au cours de l'instance en fixation de l'indemnité d'éviction, dénier l'application du statut des baux commerciaux (cass. civ., 3e ch., 3 novembre 2016, n° 15-25427).
Défaut d’inscription au RCS
Condition nécessaire
La condition d’immatriculation est incontournable pour bénéficier du droit au renouvellement ou, à défaut, au versement d’une indemnité ; le défaut d’immatriculation prive le locataire de tout droit.
Par contre, la résiliation judiciaire en cours de bail sur ce fondement ne peut intervenir (voir § 348).
Soumission volontaire au statut. En principe, le locataire commercial n’a pas droit au renouvellement du bail s’il ne peut justifier d’une inscription au RCS. Mais cette condition peut être écartée en cas de soumission volontaire des parties au statut des baux commerciaux.
Après avoir délivré un congé à son locataire, un bailleur invoque son défaut d’immatriculation régulière au RCS à l’adresse du bien loué pour lui refuser le droit à une indemnité d’éviction. Le locataire refusant de quitter les lieux, le bailleur l’assigne en justice pour demander son expulsion et une indemnité d’occupation. Selon lui, la condition d’immatriculation était requise, dans la mesure où le contrat de bail ne prévoyait pas expressément que le bailleur accepte de dispenser le locataire de l’obligation d’immatriculation. Cet argument est rejeté par la Cour de cassation. En effet, les parties déclaraient dans le bail leur intention expresse de soumettre la convention au statut des baux commerciaux, et ce même si toutes les conditions d’application de ce statut n’étaient pas remplies ou seulement partiellement. Il en résulte que le bailleur avait renoncé à se prévaloir de la condition d’immatriculation (cass. civ. 3e ch., 28 mai 2020, n° 19-15001).
Activité effectivement exercée. Un bailleur soulève que l'inscription du preneur au registre du commerce ne comprend pas l'activité effectivement exercée dans les lieux loués. De son côté, le preneur considère que l'immatriculation au RCS ne constitue pas une condition impérative pour le renouvellement du bail dans la mesure où l'application du statut des baux commerciaux avait été décidée volontairement. Les juges repoussent cet argument et donnent gain de cause au bailleur (cass. civ., 3e ch., 18 janvier 2011, n° 09-71910).
Mention de l'adresse. Un bailleur refuse le renouvellement au motif que l'adresse du locataire mentionné au RCS n'est pas parfaitement correcte (le numéro du bâtiment est erroné). Cet argument est repoussé par les juges : le « code de commerce ne comport[e] aucune exigence concernant l'identification d'un bâtiment au sein d'un ensemble immobilier » (cass. civ., 3e ch., 4 juillet 2012, n° 11-13868).
Bail verbal. Un preneur titulaire d’un bail verbal ne saurait se prévaloir de l’absence d’un écrit relatif à la jouissance des locaux pour justifier son défaut d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (cass. civ., 3e ch., 7 juin 1990, n° 89-12122).
Congé anticipé. Les mêmes obligations d’immatriculation s’appliquent lorsque le congé, avec refus de renouvellement, a été délivré plus de 6 mois avant l’expiration du bail (cass. civ., 3e ch., 8 juin 1988, n° 87-10719).
Apport partiel d’actif. La société bénéficiaire d’un apport partiel d’actif doit être immatriculée au registre du commerce et des sociétés pour les locaux, objet de l’apport à la date de la délivrance du congé ; à défaut, la société ne peut prétendre au renouvellement de son bail ou au paiement d’une indemnité d’éviction (cass. civ., 3e ch., 7 novembre 2001, n° 00-12453).
Radiation d’office. Est valable le congé avec refus de renouvellement sans indemnité délivré au vu d’un extrait du registre du commerce et des sociétés antérieur à la date du congé et constatant la radiation d’office de l’inscription de la société locataire audit registre (cass. civ., 3e ch., 20 mars 1984, n° 82-13248).
Un débiteur en liquidation de biens ne peut se faire valablement inscrire au registre du commerce et des sociétés postérieurement au jugement de liquidation ; en effet, cette inscription, en raison des conséquences qui s’y attachent, ne constitue pas un acte conservatoire que peut accomplir un débiteur en liquidation judiciaire (cass. com. 3 mai 1994, n° 92-10401).
Erreur du greffier. Est justifié un refus de renouvellement d’un bail d’un locataire non inscrit au registre du commerce et des sociétés à la date de sa demande de renouvellement. Peu importe que cette absence d’immatriculation soit le fait d’une erreur commise par le greffe du tribunal de commerce (cass. civ., 3e ch., 12 juillet 2000, n° 99-10455).
La réinscription rétroactive résultant de l’annulation d’une ordonnance prescrivant la radiation d’office suite à une erreur administrative est inopposable au bailleur (cass. com. 12 janvier 1999, n° 96-17210).
Refus de renouvellement. Le bailleur peut se prévaloir du défaut d’inscription pour refuser le renouvellement du bail sans indemnité, même quand il a déjà offert de renouveler le bail (voir § 590).
Au moment du renouvellement
Le locataire ne peut prétendre à une indemnité d’éviction s’il ne peut justifier d’une inscription au registre du commerce et aucune mise en demeure n’est nécessaire (cass. civ. 23 février 1994, n° 92-13588).
Cette immatriculation est également nécessaire au jour de l'assignation lorsque le locataire assigne pour faire reconnaître son droit au statut (cass. civ., 3e ch., 22 janvier 2014, n° 12-26179).
Cession du bail. Le cessionnaire du bail bénéficie de la propriété commerciale s’il est régulièrement immatriculé au jour de la prise d’effet du congé et si le cédant était lui-même immatriculé au jour de la délivrance du congé. Lorsque la transmission du bail intervient entre la date de la délivrance du congé et celle de sa prise d’effet (soit 6 mois après), le droit au renouvellement ou à indemnité d’éviction est transféré au bénéficiaire dès lors qu’il a procédé à son immatriculation au RCS pour le local en cause au plus tard à la date d’effet du congé (cass. civ., 3e ch., 28 janvier 2004, n° 02-18983).
Incendie des locaux. Dans l’attente de la fixation de son indemnité d’éviction, un locataire s’était maintenu dans les lieux. Au cours de cette période d’occupation, un incendie détruit les locaux et le preneur se fait radier du RCS. Le bailleur refuse de verser une indemnité, le locataire n’étant pas immatriculé ; l’indemnité est due, la radiation au registre étant intervenue après la date d’expiration du bail, le bailleur ne pouvait dénier au locataire le bénéfice du statut pour défaut d’immatriculation (cass. civ., 3e ch., 29 septembre 2004, n° 03-13997).
Pendant la procédure. L’immatriculation du locataire au registre du commerce et des sociétés est exigée à la date de renouvellement et à la date d’expiration du bail. Elle ne l’est pas pendant le cours de la procédure en fixation du loyer du bail renouvelé (cass. civ., 3e ch., 18 mai 2005, n° 04-11985).
Preuve de l'inscription. En pratique, le bailleur qui entend dénier le statut pour défaut d’immatriculation lèvera, en accord avec son avocat, un extrait K bis négatif et, le jour même (après 17 h afin d’éviter toute régularisation), fera donner par huissier un congé avec refus de renouvellement.
Défaut d’exploitation du fonds
Exploitation effective pendant trois ans
Les textes
Le fonds, transformé, le cas échéant, dans les conditions prévues par les articles L. 145-47 à L. 145-55 du code de commerce (voir § 720), doit, sauf motifs légitimes, avoir fait l’objet d’une exploitation effective au cours des 3 années qui ont précédé la date d’expiration du bail ou de sa prolongation telle qu’elle est prévue à l’article L. 145-9, cette dernière date étant soit la date pour laquelle le congé a été donné, soit – si une demande de renouvellement a été faite – le premier jour du trimestre civil qui suit cette demande (c. com. art. L. 145-8).
Le droit au renouvellement du bail ne peut être invoqué que par le propriétaire du fonds qui est exploité dans les lieux. Mais cette exploitation n’a pas à être personnelle, le locataire peut donner son fonds en location-gérance (voir § 724).
Exploitation effective et régulière
L’obligation d’exploiter le fonds pèse sur le locataire tout au long du bail ; elle peut être une cause de résiliation (voir §§ 522, « Défaut d'exploitation ») ; mais, pour le renouvellement, les textes imposent une exploitation effective pendant les 3 dernières années précédant l’échéance du bail d’un même fonds de commerce ou d’un fonds régulièrement transformé (cass. civ., 3e ch., 11 décembre 1979, n° 78-11156).
Exploitation antérieure. Lorsqu'aucun fonds de commerce n’a été exploité dans les lieux loués au cours des 3 années précédant la fin du bail, le locataire ne remplit pas les conditions pour bénéficier du statut des baux commerciaux, même s’il a, antérieurement, exploité le fonds pendant plus de 3 ans (cass. civ., 3e ch., 23 juillet 1973, n° 72-12816).
Changement d’activité. Le changement d’activité effectué par le locataire en place avec l’accord du bailleur ne peut avoir pour effet de priver le preneur de son droit au renouvellement (cass. civ., 3e ch., 17 mai 1977, n° 75-14680).
Chiffre d’affaires inexistant. Lorsque la consultation des bilans et comptes de résultat fait apparaître un chiffre d’affaires nul ou très faible pour les 3 dernières années, le preneur ne rapporte pas la preuve de l’exploitation effective du fonds pendant les 3 années précédant le congé visant la dénégation au statut (CA Paris 27 mars 2002, Loyers 2002, n° 206).
Mise en demeure non indispensable. Devant un abandon d’exploitation durant les 3 années précédant la fin du bail, le bailleur n’est, en principe, pas tenu d’effectuer la mise en demeure à son locataire d’exploiter à nouveau le fonds qui est prévue par l’article L. 145-17 du code de commerce (cass. civ., 3e ch., 11 décembre 1979, n° 78-11156 ; cass. civ. 23 février 1994, n° 92-15588). Un congé portant dénégation du droit au statut des baux commerciaux en raison du défaut d’exploitation effective du fonds par le locataire n’a pas à être précité d’une mise en demeure (cass. civ., 3e ch., 8 janvier 2008, n° 06-14190).
Cette absence de mise en demeure serait réservée à la cessation totale d’activité et non pour une interruption d’activité ne présentant pas un caractère définitif ou irréversible (cass. civ., 3e ch., 16 février 1982, n° 80-13528). En pratique, le bailleur envisagera avec l’huissier de justice et son conseil l’opportunité ou non de faire une telle mise en demeure.
Régularité de l’exploitation. Le droit au renouvellement du bail est subordonné à la régularité de l’exploitation (cass. civ., 3e ch., 14 janvier 2004, n° 01-17687) ; cet arrêt a été rendu à propos d’une école de danse qui n’avait pas effectué la déclaration prévue par la loi sur l’enseignement de la danse.
Indemnité d’éviction non due. Les locataires doivent être déboutés de leur demande en paiement d’une indemnité d’éviction lorsqu’ils ne justifient d’aucune inscription au registre du commerce et si aucun fonds n’a jamais été exploité dans les lieux loués (cass. civ., 3e ch., 24 février 1994, n° 92-13588) ; au cas considéré, les locaux servaient uniquement d’entrepôt et de vitrine.
Boulangerie devenue dépôt de pain. Invoquant l’article L. 145-8 du code de commerce, le bailleur refuse le renouvellement demandé par le locataire. Il met en avant le fait que, alors que le local est à usage de boulangerie, le pain n’y est pas fabriqué. L’argument du bailleur est suivi par la cour d’appel mais cette décision est censurée par la Cour de cassation : la destination de boulangerie prévue au bail n’impose pas, sauf clause particulière, la fabrication du pain dans le local loué (cass. civ., 3e ch., 27 juin 2007, n° 05-15456).
Suppression d’une branche d’activité non rentable. La suppression d’une des branches commerciales d’un fonds de commerce ne saurait être assimilée à la non-exploitation de celui-ci, lorsque le preneur continue son activité dans d’autres secteurs plus importants et plus rentables (cass. civ., 3e ch., 1er décembre 1971, Sem. jur. 1972, 150). Il serait en effet anormal d’obliger un locataire à poursuivre l’exercice d’une branche commerciale déficitaire.
Exercice du droit de préemption communal. En cas d'exercice du droit de préemption sur un bail commercial, un fonds artisanal ou un fonds de commerce en application du premier alinéa de l'article L. 214-2 du code de l'urbanisme, le bail du local ou de l'immeuble demeure soumis au statut des baux commerciaux. Le défaut d'exploitation ne peut être invoqué par le bailleur pour mettre fin au bail commercial dans le délai de 2 ans prévu pour sa rétrocession à un nouvel exploitant (c. com. art. L. 145-2, III).
Motifs légitimes justifiant un défaut d’exploitation effective
L’article L. 145-8, al. 2 du code de commerce prévoit que le locataire peut ne pas avoir exploité le fonds pendant les 3 dernières années lorsqu’il invoque des motifs légitimes.
Il appartient au locataire d’apporter la preuve de l’impossibilité d’exploiter le fonds (cass. civ., 3e ch., 16 mars 1977, Gaz. Pal. 1977, 237). Les juges du fond disposent, en ce domaine, d’un pouvoir souverain d’appréciation sur la valeur du motif allégué.
En principe, sont retenus les motifs sérieux non imputables à la volonté du locataire. C’est ainsi que la jurisprudence refuse comme motif de non-exploitation du fonds les fermetures administratives provisoires ou définitives, les différends avec un locataire-gérant exploitant le fonds, le vol de marchandises. Bien que non imputable à la volonté du locataire, la maladie de ce dernier n’est pas de plein droit une cause légitime d’inexploitation prolongée.
Opposition du bailleur à des travaux. Est un motif légitime de non-exploitation l’opposition du bailleur à des travaux de rénovation (cass. civ., 3e ch., 6 juillet 1977, D. 1977, 467).
Défaut de réparations. Le défaut de réparations incombant au bailleur peut justifier un défaut d’exploitation (cass. civ., 3e ch., 25 octobre 1976, n° 75-10823 ; cass. civ., 3e ch., 5 décembre 1979, Gaz. Pal. 1980, 123) ; il est toutefois nécessaire que le bailleur ait été mis en demeure d’effectuer les réparations lui incombant.
Maladie du locataire. La maladie du locataire n’est pas, en principe, un motif légitime de non-exploitation temporaire ; le locataire doit prendre ses dispositions pour se faire remplacer (cass. civ., 3e ch., 10 avril 1962, BC III n° 223). Toutefois, certaines décisions ont admis une interruption momentanée pour cause de maladie ; tel a été le cas à propos d’un congé maternité (cass. civ., 3e ch., 16 avril 1980, Gaz. Pal. 1980, 424).
Procédure collective. Si la période d’observation consécutive à l’ouverture d’une procédure collective constitue un motif légitime de non-exploitation au regard du refus de renouvellement du bail sans indemnité d’éviction, il n’en est pas de même pour l’inexploitation se poursuivant au-delà de cette période (cass. civ. 12 juillet 2000, n° 98-21945). Plus récemment, la Cour de cassation a retenu que la non-exploitation continue du fonds avait un motif légitime dès lors qu’elle trouvait sa cause dans le déroulement de la procédure collective (cass. civ., 3e ch., 10 décembre 2008, n° 07-15241).
Fusion de sociétés. Une fusion de sociétés ne permet pas à la société bénéficiaire du bail de se prévaloir du droit au renouvellement lorsque la société absorbée avait cessé l’exploitation (cass. civ., 3e ch., 12 mars 1974, n° 72-14727).
Covid-19. En raison de la crise sanitaire et notamment du confinement obligatoire, de nombreux commerces ont été contraints de fermer entre le 15 mars 2020 et une date variant selon la nature de leur activité. Cette fermeture administrative exceptionnelle peut-elle constituer un motif légitime de non exploitation du fonds ? En cas de litige, il appartiendra aux juridictions de répondre à cette question.
Calcul de la durée d’exploitation
La durée d’exploitation de 3 ans se calcule à compter de la fin du bail en remontant dans le passé et non depuis l’origine du bail (cass. civ., 3e ch., 12 décembre 1962, BC III n° 514 ; cass. civ., 3e ch., 12 novembre 1974, Gaz. Pal. 1975, 15).
L’exploitation doit donc se poursuivre au moment même où le bail vient à cesser et couvrir les 3 années immédiatement antérieures (cass. civ., 3e ch., 23 juillet 1973, n° 72-12816).
Le refus de renouvellement est encouru si la cessation effective d’activité est antérieure à la date d’effet du congé ou de la demande de renouvellement.
Fonds régulièrement transformé
Le changement d’activité en cours de bail, et même durant les 3 dernières années s’il est réalisé conformément aux règles de la déspécialisation partielle (voir § 451) ou plénière (voir § 461), permet au locataire de bénéficier du renouvellement.
Le locataire peut, en cas de déspécialisation plénière (c. com. art. L. 145-48), être autorisé à exercer, dans les lieux loués, une ou plusieurs activités différentes de celles prévues au bail. Dès lors que le preneur aura obtenu l’accord du bailleur ou, à défaut, une autorisation judiciaire, il pourra tenir compte, pour le calcul de la durée d’exploitation, non seulement de l’activité nouvelle et actuelle, mais aussi de celle exercée avant la transformation de son fonds.
Le titulaire d’un bail tous commerces peut changer d’activité au cours des 3 dernières années sans perdre pour autant le bénéfice du droit au renouvellement.
Changement d’activité autorisé par le bailleur. Le changement d’activité en cours de bail, lorsqu’il est effectué avec l’accord du bailleur en l’absence de procédure de déspécialisation, ne peut avoir pour effet de priver le locataire de son droit au renouvellement (cass. civ., 3e ch., 17 mai 1977, n° 75-14680) ; il en est de même lorsque le fonds et le droit au bail ont été cédés (cass. civ., 3e ch., 10 février 1988, n° 86-17178).
Départ à la retraite ou invalidité. En cas de départ à la retraite ou d’invalidité, la loi autorise la cession du bail avec changement d’activité (voir § 314).
L’exploitation par l’acquéreur du droit au bail
Le droit direct du cessionnaire au renouvellement
Le cessionnaire a un droit direct au renouvellement du bail. L’article L. 145-16 du code de commerce reconnaît d’ailleurs au preneur un droit d’ordre public de céder son bail et le droit au renouvellement de celui-ci.
Le cessionnaire n’a évidemment droit au renouvellement que s’il remplit les conditions générales de ce droit et si la cession est opposable au bailleur (voir §§ 291 à 294). Pour ce faire, il doit s’agir de la vente du fonds de commerce ou d’une cession de bail pure et simple intervenant au cours des 6 premières années du bail et non interdite par une clause expresse du contrat ou ayant été autorisée par le bailleur.
La cession du bail expiré est possible sous certaines conditions (voir § 612).
Cession au cours de la dernière période triennale
Le cessionnaire qui a acquis le seul droit au bail au cours de la dernière période triennale ne peut compléter son temps d’exploitation par celui du cédant et peut se voir refuser le renouvellement du bail ou le droit à indemnité ; il en est ainsi même s’il exerce la même activité que le cédant.
Accord du bailleur à la cession. L’intervention du bailleur à l’acte de cession et l’autorisation, contre versement d’une indemnité, d’exercer un commerce déterminé ne peuvent être interprétées comme un engagement tacite à consentir un renouvellement du bail (cass. civ., 3e ch., 16 octobre 1981, Def. 1981, 536).
Activité identique. La demande de paiement d’une indemnité d’éviction d’un cessionnaire d’un bail exerçant la même activité que celle du cédant, l’un et l’autre étant liés par le même bail doit être refusée, la cession intervenue ne concernant que le droit au bail et non le fonds de commerce (cass. civ., 3e ch., 19 juillet 1995, n° 93-20315). Dans ce cas, le cessionnaire n’achetant pas le fonds ne peut compléter son temps d’exploitation par celui du précédent locataire.
Cession du seul droit au bail. Sont valables le congé et la décision d’expulsion délivrés au cessionnaire du seul bail n’ayant pas exploité le fonds de commerce pendant les 3 années précédant la date d’effet du congé (cass. civ., 3e ch., 6 novembre 1991, n° 89-19686).
Clause « tous commerces ». La clause « tous commerces » ne dispense pas le cessionnaire du bail d’exercer la même activité (cass. civ., 3e ch., 23 février 1983, n° 81-16378 ; cass. civ., 3e ch., 6 novembre 1991, n° 89-19686). Ainsi, l’acquéreur du droit au bail, dont la destination est la décoration, qui créait dans les lieux une activité de piano-bar ne peut se prévaloir de la durée d’exploitation cumulée des fonds de commerce successifs (cass. civ., 3e ch., 4 mai 1994, n° 91-21587).
Intervention du bailleur contre rémunération. Lorsque le bailleur a donné son accord au changement de commerce au cours de la dernière période triennale du bail et a majoré alors sensiblement le loyer, le bailleur a admis que le cessionnaire du bail bénéficiait du statut des baux commerciaux et, en conséquence, du droit au renouvellement du bail acquis (cass. civ., 3e ch., 27 juin 1990, Gaz. Pal. 1991, 83).
Responsabilité du rédacteur. La responsabilité du conseil peut être engagée lorsqu’il a pris part à une cession d’un bail non renouvelable sans informer le cessionnaire des conséquences (cass. com. 27 avril 1976, n° 74-12982).
Vente du fonds. En revanche, lorsque la cession est consentie à un successeur dans l’exploitation du même fonds, ce dernier est subrogé dans les droits de son cédant ; il peut prendre en compte les années d’exploitation de celui-ci pour le calcul du délai de 3 ans ; la loi n’exige plus une exploitation personnelle au cours des 3 dernières années. D’ailleurs, la Cour de cassation a annulé une clause d’un bail imposant une exploitation personnelle du fonds pendant les 3 dernières années, cette clause emportant l’impossibilité implicite de céder le bail pendant ce laps de temps (cass. civ., 3e ch., 23 juillet 1986, n° 85-13192).
Solutions envisageables
Lorsque la cession du seul droit au bail intervient au cours des 3 dernières années du bail, le cessionnaire peut obtenir une garantie pour le renouvellement de son bail :
-soit en faisant intervenir le bailleur à l’acte afin d’accepter expressément le changement d’activité. Il serait judicieux de compléter cette intervention du bailleur par un engagement de renouveler le bail au profit du cessionnaire et une renonciation à se prévaloir du changement d’activité. La simple promesse de renouvellement du bail a toutefois ses limites puisqu’elle a été déclarée inopposable à l’acquéreur de l’immeuble à défaut de reprise de cet engagement par celui-ci (cass. civ., 3e ch., 12 avril 1983, Rev. loyers 1983, 307) ;
-soit un renouvellement du bail, voire un nouveau bail, ou une prolongation du bail en cours afin de lui permettre de respecter le délai de 3 ans dans la nouvelle activité.
Fonds mis en location-gérance
Le locataire qui met régulièrement son fonds en location-gérance conserve le droit au renouvellement, cette technique constituant un mode d’exploitation effective (cass. civ., 3e ch., 17 juillet 1981, n° 79-15598 ; cass. civ., 3e ch., 15 juin 1994, nos 92-12091 et 92-14942).
Encore faut-il, bien entendu, que ce mode d'exploitation ne soit par interdit par le bail (voir § 361).
Le bénéficiaire du contrat de location-gérance n’a, quant à lui, aucun droit au statut (cass. civ., 3e ch., 10 juin 1981, n° 79-14937 ; cass. civ., 3e ch., 21 mars 1995, n° 93-11868).
Défaut d’immatriculation au RCS du locataire-gérant. Le fait que le locataire-gérant ne soit pas immatriculé au registre du commerce et des sociétés ne peut constituer un motif pour refuser le droit au renouvellement au preneur à bail commercial loueur du fonds de commerce (cass. civ., 3e ch., 30 mai 1996, n° 94-13765).
Nullité du contrat de location-gérance. Les titulaires d'un bail ne sont pas immatriculés au RCS. Ils ont donné l'exploitation de leur fonds à un locataire-gérant qui, lui, est immatriculé au RCS. Le propriétaire adresse aux titulaires du bail un congé avec refus de renouvellement et offre d'indemnité d'éviction. Par la suite, le contrat de location-gérance est annulé en justice. Du fait de l'effet rétroactif de l'annulation du contrat de location-gérance, les titulaires du bail ne peuvent pas prétendre à une indemnité d'éviction, car ils ne sont pas immatriculés au RCS (cass. civ., 3e ch., 10 novembre 2010, n° 09-16927).
Droits des sous-locataires
Position du locataire principal
Le locataire principal ne peut prétendre au renouvellement de son bail que s’il est propriétaire du fonds exploité dans les lieux et s’il remplit notamment les conditions d’exploitation (sur cette question, voir également § 282).
Dès lors, si le locataire principal sous-loue l’ensemble du local à un commerçant qui l’exploitera pour son propre commerce, le propriétaire de l’immeuble pourra, dans certains cas, signifier congé et faire expulser le locataire principal à la fin du bail, sans lui verser la moindre indemnité. La sous-location doit être distinguée de la location-gérance (voir § 361).
Indivisibilité des locaux. Le droit au renouvellement du locataire principal limité aux locaux occupés par celui-ci ne peut s’appliquer qu’en l’absence d’une indivisibilité matérielle ou conventionnelle des lieux (cass. civ., 3e ch., 7 juillet 1993, n° 91-14658), mais la conclusion d’un bail unique pour les différents locaux n’implique pas que ceux-ci soient indivisibles.
Sous-location partielle. Lorsque le locataire principal ne sous-loue qu’une partie des lieux et que le fonds de commerce qui lui appartient continue à être exploité dans les lieux dont il s’est réservé la jouissance, il peut bénéficier pour lui-même du renouvellement, mais seulement sur les locaux qui ne sont pas sous-loués (cass. civ., 3e ch., 27 janvier 1977, n° 74-14273). Le sous-locataire, s’il remplit les conditions, pourra faire valoir son droit direct au renouvellement envers le bailleur.
Sous-location totale. Un bail stipule que les locaux doivent être constamment utilisés soit par le locataire, soit par ses sous-locataires. De plus, le bailleur savait que les locaux avaient vocation à être sous-loués en totalité. Dans ces conditions, le bailleur ne peut pas donner congé au locataire sans lui proposer soit le renouvellement, soit une indemnité d’éviction (cass. civ. 4 mai 2011, n° 09-72550).
Droits du sous-locataire
Principes
Les droits du sous-locataire au renouvellement doivent être analysés tant au regard du locataire principal que du bailleur.
Les droits éventuels du sous-locataire supposent non seulement que celui-ci ait un titre, mais aussi qu’il remplisse les conditions générales prévues par les textes du code de commerce pour bénéficier du droit au renouvellement.
Droit envers le locataire principal
Le sous-locataire ne peut demander le renouvellement de son bail au locataire principal que dans la mesure des droits que ce dernier tient lui-même du propriétaire. Le bailleur est appelé à concourir à l’acte de renouvellement (c. com. art. L. 145-32, al. 1er).
Cette disposition est d’ailleurs une simple application d’un principe juridique général : on ne peut consentir plus de droits que l’on n’en détient soi-même.
Généralement, la location principale et la sous-location expirent en même temps, la sous-location étant consentie pour la durée du bail principal qui reste à courir. Lorsque le propriétaire donne congé, celui-ci met fin au bail principal et à la sous-location. C’est à ce moment que les droits au renouvellement du sous-locataire comme du locataire principal se posent. Si aucun congé n’est donné par le bailleur, les deux contrats (bail principal et sous-location) doivent se poursuivre, mais le sous-locataire n’a pas de droit direct (voir ci-après).
Congé avec refus de renouvellement adressé au locataire principal. Dès lors que le locataire principal, après avoir reçu congé avec refus de renouvellement, n’a plus aucun droit sur les locaux occupés par le sous-locataire, il n’a plus qualité pour renouveler le bail de ce dernier (cass. civ., 3e ch., 3 octobre 1973, n° 72-12418).
Le locataire principal ne demande pas le renouvellement. Aucune disposition légale ne faisant obligation au locataire principal de demander le renouvellement de son bail, le sous-locataire ne possède aucun recours contre le locataire principal, à moins que le locataire n’ait agi en fraude des droits du sous-locataire (cass. civ., 3e ch., 20 janvier 1964, Rev. loyers 1964, 366).
Refus de renouvellement. En cas de refus de renouvellement du bail principal par le propriétaire, le sous-locataire n’est pas fondé à réclamer une indemnité d’éviction au locataire principal (cass. civ., 3e ch., 3 octobre 1973, n° 72-12418). Des dommages et intérêts pourraient être dus par le locataire principal à son sous-locataire si le bail principal est résilié par sa faute ; il en est de même en cas de sous-location irrégulière privant le sous-locataire de tout droit envers le bailleur (cass. civ., 3e ch., 7 décembre 1977, n° 76-13741).
Défaut de contestation d’un congé avec refus de renouvellement. La responsabilité du locataire principal a été retenue pour n’avoir pas contesté, dans le délai de prescription de 2 ans, le congé avec refus de renouvellement, le sous-locataire ayant perdu son propre droit au renouvellement (cass. civ., 3e ch., 14 avril 1999, n° 97-19437). Au cas considéré, le propriétaire avait délivré deux congés avec refus de renouvellement : l’un au locataire principal, l’autre au sous-locataire.
Sous-location expirant au cours du bail principal. En revanche, lorsque la sous-location expire au cours du bail principal par suite d’une modification de celui-ci, le locataire principal peut donner congé au sous-locataire pour le terme prévu au contrat de sous-location, même s'il ne coïncide pas avec la date d'expiration du bail principal (cass. civ., 3e ch., 24 février 1988, n° 86-15458).
Sous-location irrégulière. Le sous-locataire ne peut demander au locataire principal le renouvellement d’une sous-location irrégulière (cass. civ., 3e ch., 12 juin 1965, BC III n° 399) ; en effet, le locataire principal qui a consenti une sous-location irrégulière est en infraction et son bail peut être résilié (voir §§ 282 à 284).
Bail emphytéotique. La durée d’une sous-location consentie par un emphytéote ne peut excéder celle du bail emphytéotique. À l’expiration de celui-ci, le sous-locataire ne peut prétendre à aucun droit au renouvellement et, partant, au paiement d’une indemnité d’éviction (cass. civ., 3e ch., 9 février 2005, n° 03-17065).
Droits et recours envers le bailleur
À l’expiration du bail principal, le sous-locataire peut invoquer contre le propriétaire des lieux un droit direct au renouvellement. Ce droit subsidiaire suppose une sous-location régulière et une contestation des droits du locataire principal. En effet, c’est seulement en cas d’insuffisance des droits du locataire principal que le sous-locataire peut agir directement contre le bailleur (cass. civ., 3e ch., 7 décembre 1977, n° 76-12386).
Le locataire principal ne doit pas avoir obtenu le renouvellement de son propre bail avant l’expiration de la sous-location (cass. civ. 6 décembre 1972, n° 71-13240). En effet, selon cet arrêt, le sous-locataire ne peut pas demander directement le renouvellement de son bail au propriétaire lorsque le bail principal a lui-même été renouvelé : le droit direct ne joue que si le locataire principal n’est pas en mesure d’offrir le renouvellement.
Autorisation du bailleur. La sous-location doit être régulière et opposable au bailleur. Elle a donc dû être autorisée ou agréée par celui-ci expressément (voir §§ 274 à 277). Le propriétaire aura, en outre, été appelé à concourir à l’acte (cass. civ., 3e ch., 13 avril 1972, n° 71-10473 ; cass. civ., 3e ch., 14 novembre 1978, n° 76-15069).
L’autorisation générale de sous-louer, prévue par un bail, n’est pas suffisante pour conférer au sous-locataire commerçant, non expressément ou tacitement agréé par le propriétaire, un droit direct au renouvellement (cass. civ., 3e ch., 22 janvier 1992, n° 90-13736 ; cass. civ., 3e ch., 5 avril 2011, n° 10-14215).
En revanche, le propriétaire qui a autorisé une sous-location est tenu à son renouvellement lorsque le locataire principal a perdu le droit à renouvellement du bail (cass. civ., 3e ch., 30 mars 1978, n° 78-00000).
Bailleur conférant un droit au renouvellement au locataire principal. Dans l’hypothèse où le bailleur a fait bénéficier le locataire principal d’un droit au renouvellement que la loi ne lui permettait pas d’exiger, le renouvellement est régulier et le sous-locataire ne peut prétendre à un droit direct envers le bailleur.
Congé donné par le locataire principal. Le droit direct du sous-locataire envers le bailleur peut s’exercer à la suite d’un congé notifié par le locataire principal au bailleur ou de la renonciation par ledit locataire à ses droits au renouvellement (cass. civ., 3e ch., 9 mai 1979, Rev. loyers 1979, p. 424). Ainsi, le congé donné par le locataire principal entraîne la résiliation du sous-bail pour la date à laquelle il est donné, mais ouvre immédiatement au sous-locataire un droit direct à obtenir du propriétaire un nouveau bail (CA Paris 24 avril 1990, Loyers 1990, n° 271).
Défaut de congé : bail prorogé. Le sous-locataire est débouté de sa demande en renouvellement du bail formé directement à l’encontre du propriétaire, à défaut de congé délivré par celui-ci au locataire principal, le bail principal étant prorogé (cass. civ., 3e ch., 8 avril 1992, n° 90-21168 et 90-21791).
Exercice d’un commerce interdit. Lorsque le sous-locataire exerce un commerce interdit, il ne saurait prétendre que cette interdiction ne concerne que le bailleur et le locataire principal, et qu’il peut valablement se prévaloir du droit de renouvellement (cass. civ., 3e ch., 17 janvier 1966, BC III n° 29).
Résiliation du bail principal. La résiliation du bail principal entraîne celle de la sous-location. Le sous-locataire pourra, dans ce cas, faire valoir son éventuel droit direct. Le délai de prescription de 2 ans de son action envers le bailleur ne commence à courir qu’à compter de la date à laquelle la résiliation du bail principal aura été portée à sa connaissance (cass. civ., 3e ch., 23 avril 1985, n° 83-17317).
Sous-location irrégulière : conséquences. En cas de sous-location irrégulièrement consentie, celle-ci reste en principe valable entre les parties (mais non envers le bailleur) tant que le locataire principal a la jouissance des lieux. Dès lors, si le locataire principal devient propriétaire, il ne peut refuser le renouvellement en invoquant l’irrégularité de la sous-location (cass. civ., 3e ch., 30 mars 1978, n° 76-14923).
Vices du bail. Le droit direct du sous-locataire, fondé sur le statut, n’est pas affecté par les vices du bail principal (cass. civ., 3e ch., 7 mars 1973, n° 72-11058).
Sans indemnité d’éviction. Un locataire sous-loue la totalité des locaux avec l’agrément du bailleur. Il reçoit un congé avec refus de renouvellement qu’il notifie au sous-locataire. Celui-ci n’a pas pu obtenir d’indemnité d’éviction, les juges retenant qu’il n’avait présenté aucune demande de renouvellement de son propre bail (cass. civ., 3e ch., 14 juin 2006, n° 05-15975 ; cass. civ., 3e ch., 19 décembre 2006, n° 05-13461).
Pas de renonciation anticipée au droit au renouvellement. Un sous-locataire prétend à un droit direct au renouvellement de son bail auprès du propriétaire. Pour rejeter sa demande, les juges retiennent que le sous-locataire a renoncé au droit au renouvellement par une clause de son contrat selon laquelle, à l’échéance du bail, seul le preneur principal pourra en solliciter le renouvellement auprès du bailleur.
Cette décision est censurée par la Cour de cassation : le sous-locataire ne dispose d’un droit direct au renouvellement de son bail qu’à compter de l’expiration du bail principal. Il ne pouvait pas valablement renoncer à un droit dont il n’était pas encore titulaire (cass. civ., 3e ch., 28 novembre 2007, n° 06-16758).
La sous-location partielle
En cas de sous-location partielle, le propriétaire n’est tenu au renouvellement que si les lieux faisant l’objet du bail ne forment pas un tout indivisible matériellement ou dans la commune intention des parties (c. com. art. L. 145-32, al. 2).
L’indivisibilité du bail est souvent stipulée dans le contrat ; dès lors, en cas de sous-location partielle, le sous-locataire ne peut obtenir le droit au renouvellement (cass. civ., 3e ch., 11 juin 1997, n° 95-19364). Cette indivisibilité peut être déduite de certaines clauses du bail telles que celles laissant à la charge du locataire principal toute la responsabilité de la gestion des sous-locations (CA Paris 6 novembre 1992, Loyers 1993, n° 99).
Le locataire principal même titulaire d’un bail unique ne peut obtenir le renouvellement total de son bail ; ce droit ne peut s’exercer sur la partie des locaux sous-loués dans lesquels son fonds n’est pas exploité (cass. civ., 3e ch., 7 juillet 1993, n° 91-14658) (voir § 726) ; au cas considéré, les juges avaient constaté qu’il n’existait aucune indivisibilité matérielle ou conventionnelle (sur la notion d’indivisibilité, voir également §§ 624 et 637).
Appartement au-dessus de l’officine. Un pharmacien titulaire d’un bail unique portant sur une boutique et l’appartement au-dessus consent, conformément aux clauses du bail, une sous-location sur l’appartement. À l’arrivée du terme, il demande au propriétaire le renouvellement du bail pour l’ensemble des locaux. Le bailleur répond hors délai à sa demande en limitant le renouvellement aux seuls locaux de la pharmacie. Le pharmacien fait valoir que le défaut de réponse du bailleur dans les 3 mois de sa demande entraîne acceptation du renouvellement du bail pour le tout. Ce point de vue est repoussé par les juges : l’appartement étant séparé physiquement de la boutique et aucune clause du bail unique ne posant un principe d’indivisibilité des locaux, le pharmacien a perdu tout droit sur le logement. Le bailleur, bien qu’il n’ait pas répondu à la demande du locataire dans le délai légal de 3 mois (c. com. art. L. 145-8), peut refuser le renouvellement des locaux sous-loués (cass. civ., 3e ch., 15 novembre 2006, n° 05-17572).
Sans mention dans le bail. Lorsque le bail ne précise pas si les locaux forment un tout indivisible, les juges doivent rechercher, dès lors que cela leur est demandé par le sous-locataire, si les locaux sont matériellement divisibles (cass. civ., 3e ch., 19 janvier 2011, n° 09-72040).
Les positions à prendre
L’articulation des droits du sous-locataire soit envers le locataire principal, soit subsidiairement envers le bailleur, conduit aux principales solutions pratiques ci-après, qui seront mises en œuvre après avis d’un avocat spécialisé dans le domaine des baux commerciaux :
-dans l’hypothèse où le bail principal a été renouvelé, le sous-locataire demandera au locataire principal le droit au renouvellement ;
-lorsqu’un bail principal est plus long que la sous-location, la demande de renouvellement par le sous-locataire doit être faite au locataire principal si la durée restant à courir du bail principal est suffisante pour remplir le sous-locataire de ses droits ;
-lorsque le propriétaire donne congé avec offre de renouvellement au locataire principal et au sous-locataire, le sous-locataire peut faire valoir son droit direct envers le propriétaire. Le loyer renouvelé ne peut être déplafonné du seul fait que les parties contractantes ne sont plus les mêmes que celles du bail expiré et que certaines clauses du bail à renouveler au profit du sous-locataire ne sont pas les mêmes (cass. civ., 3e ch., 14 mai 1997, n° 95-15976) ;
-si le bailleur ne donne pas congé avant les 6 derniers mois du bail principal, le sous-locataire a intérêt à demander le renouvellement de son bail au bailleur et ce, en tant que de besoin. En effet, si le locataire principal ne réagit pas au cours des 6 derniers mois de son bail, ce dernier sera prorogé par tacite reconduction et le sous-locataire aura perdu son droit direct envers le bailleur (voir § 729, rubrique « Défaut de congé : bail prorogé ») ;
-lorsque la sous-location porte sur l’ensemble des locaux, le locataire principal a généralement perdu tout droit à la propriété commerciale. Le sous-locataire peut, s’il remplit les conditions, revendiquer un droit à renouvellement envers le bailleur.
Statut du locataire étranger
Jusqu'à l’intervention de la loi 2014-626 du 18 juin 2014, les dispositions relatives au renouvellement du bail commercial étaient expressément réservées aux commerçants, industriels ou artisans français. Il existait toutefois des exceptions, notamment pour les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou encore pour les étrangers dont les enfants étaient français (c. com. art. L. 145-13 ancien).
Cependant, la Cour de cassation avait jugé l'article L. 145-13 du code de commerce discriminatoire et, à ce titre, prohibé par l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (cass. civ., 3e ch., 9 novembre 2011, n° 10-30291).
Faisant suite, avec un peu de retard, à cette jurisprudence, l’article 5 de la loi du 18 juin 2014 a abrogé l'article L. 145-13 du code de commerce, ainsi que l'article L. 145-23 qui limitait lui aussi les droits du locataire étranger.
Les locataires de nationalité étrangère bénéficient donc des mêmes droits que ceux dont bénéficient les locataires de nationalité française.